Mardi 28 avril 2009 (partie 2)
Et dans tout ce brouillard, je cherche l'arc-en-ciel. Du coup, je me penche dans mon sac et j'y trouve le dernier Technikart + le catalogue de l'exposition "Ecritures Silencieuses" à l'Espace Vuitton + un sachet dans lequel on trouve des pigments pour lèvres Armani ainsi que son pinceau rétractable + un blush Mac couleur Flower Power + un catalogue de Thomas Hirschhorn + un disque dur + le dernier Depeche Mode "Sounds of Universe" + .les "Midnight Juggernauts", "Dystopia" + mon Ipod avec dedans une interview de Carole Chretiennot du Flore fraîchement réalisée pour le catalogue du "Parcours Saint-Germain" + mon mobile, une boîte de mini-feutres Stabilo des fois que de vieilles envies de dessiner ou de colorier me prendraient… et aussi un portefeuille mordoré acheté à paris juste après un voyage à Miami, une bourse rouge achetée à Shanghaï et qui sert d'étui à mon appareil photo + mon "répertoire" aussi lourd qu'un annuaire téléphonique des années 80, mes Wayfarers, mes gants de pilotage taillés dans un cuir de Formule 1… et surtout ma casquette de marin contre la pluie contre la pluie contre la pluie!
Si sous cette pluie, je suis chargée comme une mule, c’est pour me stabiliser sur mon vélo de critique d’art. C’est drôle, pas besoin d’être un fin limier pour être capable de décrypter ma journée à travers les communiqués de presse, les catalogues et les magazines que je traîne dans mon sac. Je pense que je ferai la joie d’un détective privé ! Quoique je sois difficile à prendre en filature, on me l’a déjà fait remarquer : trop rapide, trop impulsive, trop imprévisible.
Et là ? Je reviens donc d'un déjeuner sélect à l'Espace Vuitton organisé par Marie-Ange Moulonguet et Domoina de Brantes. Dans la célèbre cuisine qui surplombe les Magasins Vuitton de l’avenue des Champs-Elysées. Vue plongeante sur la ville.
Et dans la tête, j’ai le nom de quelques-uns des convives… je ne peux donc m’empêcher de name-dropper deux minutes.
A commencer par notre hôtesse principale à l’Espace Vuitton: Marie-Ange Moulonguet, ainsi que Hervé Mikaeloff. Emmanuel de Brantes, le mari de Domoina, evidemment. Puis Fabrice de Rohan-Chabot avec qui j’ai travaillé à Technikart à mes débuts. Gallizia, Jean Faucheur, Nirit, Dominique Plassart, Nathalie Pasqua, Camille… et d’autres, tous ont un rapport de près ou de loin avec une des familles de l’art, du design, de la musique ou du journalisme.
En guise d’apéritif, j’ai eu tout le temps de déambuler dans la très belle expo du moment : « Ecritures Silencieuses ».
Pas besoin de se munir d’une « Pierre de Rosette » pour déchiffrer les messages laissées par cette quinzaine d’artistes contemporains. Il suffit de se laisser porter. On y trouve l’étrange alphabet de Closky, les installations lettrées de Jenny Holzer, les messages informatisés de Charles Sandison, les phrases murales de Lawrence Weiner, les empreintes d’Ernesto Neto ou les définitions de Kosuth… et on oscille entre sens et non-sens dans cette mise-en-scène monogrammaticale siglée Vuitton. Mais le clou de l’expo est à l’entrée et agit comme un point de départ. C’est les origines de l’écriture qui sont mises en scène derrière de simples vitrines. Ce n’est pas la pierre de Rosette, mais ça en a le parfum. C’est un saut dans l’histoire avec 3 tablettes d’écritures glyphes issues de l’Ile de Pâque restées indéchiffrées depuis la nuit des temps. Le challenge, ce serait de trouver un Champollion, ici et maintenant, pendant l’exposition.
Ça c’était donc un bel apéritif… et en dessert, il y avait la perf de Sun7, un graffeur… mais je l’ai loupé parce qu’il fallait absolument que je file au Flore interviewer Carole Chretiennot pour le catalogue du « Parcours Saint-Germain » : c’est un événement qui se déroule dans le quartier Saint-Germain depuis 10 ans et auquel le Flore participe activement depuis les origines.
L’interview était au top. Une énergie rare circulait entre nous.
Ça a commencé comme si d’emblée, on était de la même famille puisqu’en voyant le dernier Technikart déborder de mon sac, on a tout de suite enchaîné sur des amis communs.
C’est Fabrice de Rohan-Chabot qui venait de me le donner, en exclu avec en couve Houellebecq face à Iggy Pop. Une rencontre saugrenue menée par Benoît Sabatier, évidemment… Saugrenue ou inattendue mais finalement plutôt logique.
Carole y jette un coup d’œil pour y retrouver l’article sur le Prix des Lilas, un Prix dont elle est à l’origine comme le Prix de Flore d’ailleurs. Le Prix des Lilas, qui se déroule donc à La Closerie…des Lilas ( !) récompense un écrivain femme. Le jury est lui aussi exclusivement féminin et surtout, il évolue d’une année sur l’autre. Il fallait y penser.
D’ailleurs, ça nous amène à tous ces débats autour des femmes, de la création et de la pro-création… et au fait que les femmes sont sous-représentées dans un monde où les hommes se cooptent naturellement depuis la nuit des temps, reléguant la femme aux fourneaux finalement. Et du coup, cette année, ça donne « Elles » : une relecture en version féminine de la Collection du Musée d’Art Moderne au Centre Pompidou. Louise Bourgeois, Gina Pane, Annette Messager, Dominique Gonzalez-Foerster…
Mais je m’éloigne un peu là… on retrouve donc l’article en question sur le Prix des Lilas dans les premières pages de Technikart. On en profite pour parler d’un ami commun, mon ex-rédac-chef à Tech, Raphaël Turcat humblement surnommé « Turcatausore » pour son regard d’acier et ses coups de sang légendaires, intempestifs et enflammés. Un très tranquille cracheur de feu à la tête d’une rédaction, en somme !
On enchaîne sur l’interview avec Carole. Elle me parle bien sûr du Parcours Saint-Germain, des Prix de Flore et des Lilas, de ses parents qui ont fondé le Flore. On parle d’art, d’amour et de son amoureux : un artiste justement. Je ne peux m’empêcher de lui demander qui est ce mystérieux artiste dont elle dit qu’il est trop chèr pour qu’elle ne le collectionne mais dont elle est absolument fan… forcément ! Mon sang ne fait qu’un tour quand elle décline son identité : c’est Philippe Perrin !
Mais bien sûr que je le connais !
Lui dirais-je ? Ne lui dirais-je pas ?
On continue cette interview dans les bureaux du Flore. J’ai loupé le Prix des Lilas mais l’année prochaine, c’est sûr, j’y serai. On parle des artistes qu’elle collectionne, ou de ceux qui l’ont marquée ces dernières années, ainsi que ceux qui ont participé au Parcours en direct du Flore. Claude Rutault, Erwin Wurm, Natach Lesueur. Cette années, ce sera Guy Limone qui comme son nom l’indique est entre autres un adepte de la couleur jaune. Il collectionne d’ailleurs des carrés de couleurs qu’il trouve dans les magazines ou les prospectus. Il en fait des œuvres rangées par couleurs, avec leurs variantes. Ce sont comme des panoramas chromatiques. Des posters, presque des tapisseries dont on aime se perdre dans les détails.
Tout est fluide entre Carole et moi. C’est une véritable rencontre comme on les aime. Pleine d’énergie. A chaque idée que l’on échange, on a un million de choses en commun !
… mais pour Philippe Perrin… lui dirais-je ? Ne lui dirais-je pas ?
Bon, en tout cas, Guy Limone réalisera les sets de table lors du Parcours… je lui dis qu’une partie de mon mémoire de maîtrise en histoire de l’art et en esthétique était justement consacré à cet artiste qui, en 92 déjà, était à la Galerie Perrotin, « MA galerie » !
… et pour Philippe Perrin… je lui dis ou je ne lui dis pas ?
A la fin de l’interview, n’y tenant plus, je me lance dans une explication. Je rappelle mes débuts à Technikart, dans la rubrique Arts… he, bien, il y a eu une période où il y avait une chronique intitulée « Que sont-ils devenus ? »… où j’avais eu l’idée saugrenue d’y insérer Philippe Perrin qui n’avait pourtant jamais disparu. Mais moi, dans les expos et ailleurs, je trouvais qu’il n’était pas assez présent à mon goût. Alors je m’étais débrouillée pour le joindre et faire cet article sans réellement lui dire de quoi il s’agissait… et, apparemment, il ne l’avait pas totalement apprécié. Il avait cherché à joindre Turcatausore… bon, des années plus tard, ces deux-là sont totalement amis et cette histoire est devenue une grande blague entre eux. Mais je ne suis pas sûre que les murs de Tech n’aient pas tremblé sur le passage d’un Perrin plus qu’enervé venu secouer les puces d’un Turcat plus qu’innocent dans cet affaire ! Et aujourd’hui, bras dessus bras dessous, tout le monde se marre encore en évoquant de temps à autre cette histoire alanguis sur la terrasse ensoleillée du Flore.
Anaïd Demir
vendredi 31 juillet 2009
Inscription à :
Publier les commentaires (Atom)
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire