Samedi 16 février
J’ai failli séché le cours d’Aérobic Philosophique… d’autant que je me sens plus Heideggerienne que Nietzschéenne. J’ai tout de même senti, comme une vraie Nietzchéenne, mon corps exister en speedant sur mon vélo pour finalement arriver en retard et en nage au 07, boulevard des Filles du Calvaire… qui pour la circonstance portait bien son nom ! J’avais non seulement un quart d’heure de retard… mais en plus je trouvais porte close ! Pas de code. Pas même une plaque annonçant la galerie Vanessa Quang. Pas d’atroupement devant la porte. Pas l’habituelle foule d’amateurs d’art éclairés du samedi. Aucune trace visuelle de Mano avec qui j’avais RDV. Téléphoniquement inaccessible. Pas le moindre numéro de téléphone vaillant sur moi. Jusqu’à ce que je capitule. Je décide finalement d’aller ailleurs, en éprouvant presque un soulagement à l’idée de rater cette séance de sport. Pas de Galerie Vanessa Quang. Ça n’existe pas dans le Marais. J’ai dû rêver ce déménagement et cette adresse.
Axel Dibie me rejoint et on décide de faire deux-trois galeries alentour…
Et en louvoyant dans les rues du quartier, par hasard on passe… Quuuuuoi ? Oùùùù ça ? Ai-je bien lu ? Où suis-je ? RUE des Filles du Calvaire ! Il y a donc aussi une RUE? Est-on sûr que c’est bien la RUE et non pas le BOULEVARD des Filles du Calvaire que l’on indique sur le Net quand on googlise Vanessa Quang ?
C’est insensé : le Web passe son temps à nous induire en erreur avec ses complices Dr Google & Mr Hyde.
Je suis donc au 07 RUE des Filles du Calvaire avec ½ heure de retard sur mon RDV. Une plaque dorée souligne que je suis bien à destination et une hôtesse m’accueille sur le pas de la porte avec un sourire radieux pour cette journée qui annonce déjà le printemps. Je lui suggère de poster aussi quelqu’un au 07 du Boulevard du même nom… et je file me mettre en tenue rapido !
Le prof d’aérobic, Pascal Lièvre, donne un nouveau cours dans 4 minutes : Mano et sa fille Clarisse, pas fatiguées pour un sou, sont prêtes à s’y remettre une nouvelle fois avec moi. La petite n’a même pas trois ans et est déjà accro… que dosi-je en conclure ?
Collants violets et jupette en mousseline verte. Chaussons Repetto. Guètres multicolores. Je me sens comme un Energy Drink. Prête à donner tout ce que j’ai à ce prof aux allures christiques. La séance commence. Un truc entre la Messe… pour le temps présent, l’aérobic évidemment et le séjour chez les Raëliens quand même.
Mes bras et mes jambes commencent alors à m’échapper pour suivre les flexions verbales de Maître Lièvre, sous l’œil complice de Vanessa Quang.
Je crois même perdre pied, puis perdre corps. Et entre mon corps et mon esprit, comme d’habitude, il y a scission.
« Le CÔrps…EST…un Êttttre PUISsânnt » m’entend-je répéter en chœur avec le groupe.
Et de continuer. « Le CÔrps…EST…un saÂage inconnu… qui-a-nom…SSSSSoi »
Encore répéter. Inlassablement. Accompagner les gestes et sentir les mots investir le corps. Chasser l’esprit. Je suis complètement partie. Et d’ajouter… encore une fois sans me faire suer « IL… est… TON… corps ».… « IL… EST… TON CORPS »
Et pendant ce temps, pendant que mon corps s’attarde dans les exercices du cours d’aérobic philosophique, mon esprit lui s’est permis une ballade dans les œuvres. Tout seul. Il erre parmi les photographies et vidéos de l’expo et, tout en observant les slips frappés du sceau de Kant, les boxers Heidegger et les caleçons Schoppenhauer, je sens mon esprit, malgré lui, suivre les conseils de Maître Lièvre et bander mentalement pour la philo.
Ça marche, alors à quand un défilé pendant la fashion week avec tous ces vêtements qui sans cesse tentent de séparer le corps de l’esprit ?
J’ai tôt fait de rassembler mes esprits, de les incarner dans mon corps et de repartir sur mon vélo pour de nouvelles aventures artistiques.
Sur le chemin, en direction de la Galerie Magda Danisz où le vernissage de Laurina Paperina a lieu, je pensais avoir retrouvé mes esprits mais je réalise que non, je suis encore en corps. Mon esprit court après mon corps dans le but d’une synchronisation. En vain.
Alors qu’au sous-sol, le Pape est mis à mal dans un dessin animé très bien ficelé, les drôles de dessins de cette jeune artiste Italienne posent des questions auxquelles je n’avais jamais pensé… et notamment, la question de la reproduction des Schtroumpfs, qui n’a jamais été éludée.
En effet, comment les petits êtres bleus se reproduisent-ils avec une seule et unique Schtroumpfette ? Quelqu’un me rappelle au passage que la Schtroumpfette n’est rien d’autre qu’une créature de l’Enfer, spécialement créée par Gargamel lui-même. D’ailleurs, on a la preuve en image dans cette expo qui répond, toujours avec la même ironie, à d’autres étranges et nombreuses questions encore. Mais je crois me rappeler que les Ayant-droits de Peyo, le défunt créateur des Schrtroumpfs, n’aimaient pas forcément que l’on joue avec l’image des petits bonshommes bleus. Je me rappelle d’une expo de Joachim Mogarra qui n’a jamais eu lieu à Paris à la Galerie Vallois… l’artiste utilisait avec finesse des photographies noir et blanc des Schtroumpfs.
Et ici, pendant que l’artiste avance sa théorie sur Schtroumpfs et Schtroumpfette, je regarde autour de moi : ça crie, ça geint, ça risette et l’espace est submergé de poussettes. Plusieurs véhicules sont même garés à l’entrée. Près des communiqués de presse, on a la preuve : les artistes ne sont plus des solitaires, des êtres asociaux, qui du fin fond de leur cave refont le monde, prêts à se couper l’oreille en cas d’insuccès. Non. C’est même le baby-boom chez eux… mais là, personne ne se demande comment ils se reproduisent.
Chez Lucile Corty, dans cette nouvelle galerie du Marais, pour le vernissage d’Emilie Pitoiset, même chose : une armée de bébés a pris d’asssaut la galerie à coups de poussettes, de cris et de larmoiements. Qui sait si l’on n’est pas ainsi en train de créer une génération tant gavée d’art qu’elle sera prête à le détester et le rejeter de tout cœur. Non, ça devrait créer l’effet inverse justement : une génération d’institutionnels de l’art ou encore des artistes… mais des êtres plutôt naturellement créatifs.
Je change de galerie et chez Almine Rech, je me laisse submerger par la sensualité d’une vidéo d’Ange Leccia. A l’opposé, Ziad Antar filme des mains nerveuses qui jouent avec violence « La Marche Turque » sur un piano.
Est-ce que je fais un tour chez Yvon Lambert… pas aujourd’hui. Pas tout de suite, même si je sais qu’il y a le Minimal Carl André et que cette expo, c’est pas que dalle!
Un saut au Progrès pour rendre le collant doré à la très belle Miss Marion… et le reste m’appartient.
mercredi 29 juillet 2009
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