Dimanche 07 décembre 2008
Hier c’était ma journée 18ème. Pas le siècle, mais l’arrondissement de Paris. Celui de toutes les Amélie Poulain du monde.
J’ai dormi Rue Pierre l’Ermite où j’ai momentanément aterri près de La Goutte d’or et j’ai marché en direction de la Rue des Martyrs à toute vitesse. Là, je me suis attardée chez Rose Bakery pour y débusquer le Fusac, le journal franco-Américain dans lequel j’espère repérer mon futur appart, mon petit nid de scribouillarde, dans les petites annonces.
Je m’installe 5 minutes rue des Abbesses pour le parcourir en terrasse en sirotant un café. Et je réalise que c’est bientôt Noël puisque le petit marché -de Noël !- s’est installé sur la place. Dans des petits chalets de bois. Ce serait presque un paysage Scandinave… mais sans la neige !
Et d’ailleurs, il fait tellement froid que j’imagine qu’il ne devrait pas tarder à neiger ici aussi.
Ça m’arrive rarement d’être au pied de la Butte… alors je grimpe. Et je croise par hasard la Rue des Trois Frères… du coup, avant de retrouver Morgane pour déjeuner, je fais un saut à la Kadist Foundation pour l’expo de Diane Arbus. C’est la rétrospective de cette grande photographe de la presse de mode des années 60.
Mais absorbée par ces délicates images noir et blanc issues de Harpers’Bazar, Glamour & co, je ne dois pas oublier pour autant mon dèj à l’Hôtel Particulier avec Morgane. Alors je file remonter la Rue Lepic et je grimpe tellement haut que je me retrouve comme par magie et presque instantanément Place du Tertre au milieu d’une énorme carte postale… celle de cette bande de touristes qui se fait tirer le portrait par tous ces « croque-papier Tertrois ». A la chaîne ou presque, mais avec ue certaine poésie. Ça a un parfum d’éternité qui me ramène ç l’enfance… mais il s’agit de rejoindre Morgane à « l’Hôtel Particulier » pour déjeuner alors qu’il est bientôt……14h ???!! Je redescend la rue Lepic, et c’est justement là que je croise Morgane comme par enchantement ! Pourquoi là ? Comment ? Dunno !
C’est toujours pareil depuis que je la connaîs, Morgane a quelque chose à voir avec la féerie et son prénom ne ment pas sur la nature réelle du personnage. Et si elle ne m’était pas apparue, je n’aurais jamais tourné là, dans le deuxième virage, au niveau du troisème quart. Et je n’aurais donc jamais débouché sur ce chemin pavé où un Rocher baptisé « de la Sorcière » nous apparaît et nous barre la route ! Mais Morgane ne se laisse pas impressionner, elle rejette sa mèche blanche en arrière, on la contourne et on avance. On pousse la grande grille noire et, derrière les feuillages, une demeure de Style Directoire nous apparaît. On monte sur le perron et une jeune femme au teint de cire et aux cheveux d’ébène nous ouvre la porte instantanément. Blanche-Neige ?? Pas du tout ! On n’est pas chez Walt Dysney ici, mais chez Morgane Rousseau !
On descend dans les cuisines, au sous-sol, à deux pas du jardin plein de végétaux qui dépaysent… alors qu’Eléna, la femme de chambre et le bras droit de Morgane en tenue d’intendante, le regard bleu et alerte, va et vient entre les chambres et les coulisses… enfin, les cuisines ! C’est drôle, léger et volubile. Frais. A tel point que j’ai l’impression d’être dans une pièce de théâtre. Un Molière, ou bien un vaudeville très 18è… siècle, cette fois ! A moins que ce ne soit une sit-com.
Pourquoi : la chambre 5 est occupée par une personnalité politique qui vit une Renaissance amoureuse et qui n’arrive pas à quitter ce nid d’amour à une heure réglémentaire pour un hôtel. De quel personnage politique s’agit-il? Secret professionnel oblige, Morgane tait le nom de ces tourtereaux réfugiés dans le nid d’amour qu’est la chambre 5. Quoique je devine qu’il s’agit de Ségolène. Quant à son boy friend, j’ai ma petite idée… mais peu m’importe.
Morgane est aux fourneaux : son aura l’accompagne alors que mes pensées donnent sur le msytérieux jardin qui s’offre à moi. Je coupe les poivrons rouges en 4 et notre cordon bleu enfourne le poulet farci de citrons et d’épices.
Et pendant que tout cela mijote, à partir d’un article dans Modzik sur ce nouveau lieu ouvert par Morgane et son complice Frédéric Comtet, on remonte le temps… du temps où Morgane était châtelaine à Bionnay, près de Lyon. Une fée aux longs cheveux blonds qui, pas une seconde ne s’ennuyait dans son château où elle invitait tous les artistes qu’elle aimait à venir en résidence. Il y a une dizaine d’années. Puis il y a eu la période « Péniche », plus cinématographique, du temps où Paris lui manquait et où elle est venue se laisser bercer sur la Seine du temps. C’était plus la période « soirées » qu’expos… mais toujours sur les murs, les artistes signent leur présence.
Et aujourd’hui, c’est une synthèse entre la péniche et le château. Des évènements ponctuels ont lieu dans ce manoir, mais les pensionnaires s’oublient dans ces 5 suites designées par des artistes. Ils cohabitent avec des œuvres jusque dans leur lit. Philippe Mayaux, Natacha Lesueur… Le metteur-en-scène du vêtement Olivier Saillard a signé une chambre où les abatas-jours sont des chapeaux et les rideaux sont en caban… ma chambre préférée est celle de Martine Aballéa qui a apporté un peu des nocturnes feuillages du mystérieux jardin extérieur à l’intérieur… entre boiseries et végétaux, l’esprit vagabonde.
On est à ailleurs qu’à Paris et à une autre époque… c’est l’effet Morgane.
On n’est pas seulement dans le 18è arrondissement, à Paris, entre le Rue Lepic et l’avenue Junot, on est aussi au 18è siècle.
Elena, l’intendante continue ses va-et-vient entre les étages, entre les chambres et la cuisine en roulant joliement les R dans son costume bleu marine à collerette blanche. Morgane pourrait être sortie d’une pièce de Molière : chausses et souliers de satin, cheveux blonds vaporeux… c’est dans cette tenue que quelques heures plus tard, après s’être pourléchées les babines de notre succulent poulet citron avec vue sur les feuillages, on s’est rendus chez les voisins pour définitivement perdre nos repères dans l’espace-temps.
Nous voici en compagnie d’une bande de pétanqueurs en pleine action pendant le téléthon, avec option bar et karaoké. Après le voyage temporel, c’est une mutation géographique qui s’opère : on est sûrement dans un lointain village de province et là, entre deux pastis-Perrier (ça change du Champ’ réglementaire), un certain Béni sort un bouquin. Le trombinoscope des gens du « village » : les personnages les plus historiques, charismatiques et légendaires du coin nous offrent leur plus joli minois pendant qu’un court texte dresse leur parcours, de leur naissance jusqu’à leur arrivée sur la Butte.
Jen profite pour lui demander s’il connaît ma tante Marie-Jeanne : ue actrice à la retraite qui est elle-même résidente émérite de ce village depuis des lustres.
Il me répond oui mais ne s’étend pas sur la réponse pour reprendre son bouquin à la page où il l’avait laissée. Pendant ce temps, un type chante une chanson à la gloire du quartier et l’accompagne à la guitarre sèche sur une scène de fortune… Place Dalida, Rue Navarin, Rue Ronsard, Rue Burq, la statue de Marcel Aymé sortant du mur… on est vraiment dans la carte postale finalement. J’ai été incrustée dans un dessin animé. Les personnages se sont animés les uns après les autres.
Une fois ce saut de chat dans l’histoire effectué, on reste dans le même périmètre mais Morgane m’entraîne en face, dans un édifice face à l’Hôtel Particulier. Un véritable observatoire sur l’Hôtel ? Une vue imprenable. Quel endroit hallucinant… c’est l’appart de Morgane et tout ici ressemble à l’intérieur d’un bâteau : fenêtre en hublot et rideaux en tartan. Faut-il rappeler les origines bretonnes de la Fée qui nous reçoit en sa demeure ?
En tout cas, notre hôtesse est en plein montage de son propre film et Maxence Cyrin, le compositeur aux doigts de fée qui reprend des tubes de Depeche Mode ou d’Elvis au piano, vient ajouter sa note au tout.
Je laisse tout ce petit monde charmant travailler sur un film que j’ai hâte de voir finalisé, celui de Morgane. Son fils Oscar, l’un des acteurs principaux du film, est à suivre de près : il pourrait bien faire de l’ombre à Louis Garrel avec ses yeux de chat.
Tout cela m’a donné des envies de cinéma. Je repars dans l’obscurité hivernale, bercée par le bruissement des feuillages. Je quitte les lieux sur la pointe des pieds avec la peur de quitter un trop bon rêve.
J’appelle Karine pour lui proposer une soirée ciné. RDV dans une heure chez elle.
En douceur, je remonte la Butte. Et sans l’avoir calculé, en remontant la Rue Lamarck, me voilà tout là-haut, au Sacré-Cœur. J’en profite pour allumer un cierge car on n’arrive jamais par hasard en haut de la Butte.
Coucher de soleil et petite flamme… je fais un vœu, celui de quitter le 18è avant une semaine. Quitter Pierre l’Ermite et trouver un appart clean, lumineux et sain avant 7 jours. Il faut quitter sans attendre l’endroit irrespirable où je me trouve. Oublier ce capharnaüm. Je prie Saint-Expédit, empereur Romain d’origine Arménienne, Patron des causes à expédier d’urgence, pour sortir de ce bouge puant.
A la sortie, coucher de soleil sur la Butte. Je redescend à petits pas… et me voilà Rue Papillon dans le 9è en un éclair. Au 04, Natacha Lesueur sort de chez Karine Arabian, la boutique, les bras plein de sacs et l’air absent, comme en pleine descente après l’extase. Elle a fait une razzia de shoes pendant les soldes et c’est l’adrénaline. L’effet Arabian !
Je n’ai même pas le temps de lui dire que je sors tout juste de sa Suite mansardée dans l’Hôtel Particulier : la chambre « Rideau de cheveux », la plus grande de toutes. Celle qui fait hommage au corps et à la transparence.
Je ne verrai pas les trésors cachés dans les sacs rose et prune de Natacha… mais je sonne chez Karine, juste à côté.
Côté ciné, on a beau éplucher les programmes, on a rien à s’offrir en cette période pré-Noël. Autant mater un DVD ? Ou bien opter pour « Two Lovers » de James Gray avec Joaquin Phenix et Gwyneth Paltrow ? Non, je l’ai déjà vu la semaine dernière… ça ne se regarde pas deux fois ! Pas assez de matière. Tout est dû à l’incroyable charisme de Phénix là-dedans, son aura, son mystère, sa profondeur à lui… mais rien de plus. Mettons un acteur sans épaisseur à sa place et personne ne s’arrêterait sur ce film.
Alors, ciné ? Non ! On appelle Jennifer Guesdon, une amie journaliste sur Cap24, pour qu’elle se joigne à nous : elle a des envies de plateaux d’huîtres… et moi, des envies de tourteau. Je ne repousse jamais un crabe qui me tend les bras, il y a toujours moyen de se serrer la pince.
Ambiance raffinée, design Arts Déco et lumières tamisées Place Clichy. La Brasserie Charlot, malheureusement est pleine à craquer. Quelle idée d’avoir des envies de brasserie un samedi à Paris ! On se rabat en face, chez Wepler, tout aussi délicieux… l’éclairage en moins. Gilles Jaroslaw, ami commissaire d’expo et esthète nous rejoint
Et de là, on aterrit pour le téhé chez Jennifer… en attendant 00h08 avec impatience. A 00h08, sur Direct 8, il y a la première de « Be contemporary » : l’émission qu’on a tourné toute l’année avec Ingrid à travers le monde ! C’est enfin programmé : tous les samedis à 00h08 sur Direct 8. La première est celle de Miami Art Basel. Joli moment que de revoir toutes ces images en compagnie de 3 amis talentueux, à l’œil expert et à l’esprit critique développé. Ils adorent notre RDV hebdo et ils adorent les voix off ! 26 mn d’art et de bonheur à renouveler donc. Et moi qui ai du mal à me contenter de peu, je suis hyper fière de cette première émission fraîchement diffusée !
Je repars légère sur le scoot de Karine rejoinde mon lieu de résidence ponctuel dans le 18è… en attendant de m’installer dans mon quartier préféré : sous les ailes du Génie, à Bastille. C’est là que j’ai dû vivre dans une autre vie. Là que je me sens le mieux.
Anaïd Demir
mercredi 29 juillet 2009
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