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******************************* Anaïd is… Anaïd forever ******************************* Née à la Saint-Hubert patron des Chasseurs, élevée à l'acide, gouvernée par Mars et Pluton, habitée par le démon de l'écriture, rongée par la passion

mercredi 29 juillet 2009

Episode 26

Lundi 08 septembre 2008

Petit retour en arrière : le 26 juillet dernier, à 16h47, je n’étais pas à la chasse aux papillons… mais Gare de Lyon ! Je devais retrouver un Suisse, Raphaël Julliard, qui faisait un passage-éclair à Paris pour récupérer sa DeLorean -la voiture de « Retour Vers le Futur »- fraîchement achetée sur ebay.
Et quand elle se pose quelque part, la DeLorean déploie en guise de portières, ses deux magnifiques ailes. Année : 1981.

J’en ai profité pour faire parler Raphaël de la Galerie J (J…comme Julliard, évidemment !) : son projet de voiture-galerie-d’art démarré il y a 1 an et demi à Genève avec une Golfe GTI. Année 1981, elle aussi !
Projet qui, depuis samedi, se poursuit donc à Paris.
A 17h06, le 26 juillet 2008, j’ai donc retrouvé au « Train Bleu » une horlogerie Suisse fort mécontente de mon retard ! Il s’appelait Raphaël Julliard. Je l’ai reconnu au premier regard. Chevelu. Barbu. Casquette et regard d’acier. L’air de sortir d’un film de Larry Clark? Un côté bûcheron Suisse sans les carreaux ? Un peu tout ça à la fois.

Et sa DeLorean ? Un vrai piège à filles ! Sans être une assidue des moteurs à huile, des bielles, des vis platinées et des garages… je ne demandais qu’à la voir et faire une ballade à son bord. Il m’a justement proposé d’aller avec lui la chercher ! Il s’agissait donc de poursuivre l’odyssée. J’ai à peine hésité ! Adieu mon vélo… je reviendrai plus tard le chercher.
A peine était-ce décidé que l’on s’engouffrait déjà dans les méandres du métro, direction Crimée. Mes ballerines roses nacrées sur les talons de ce géant Suisse, j’étais sur les traces de la fabuleuse DeLorean… prête à me convertir au Raphisme (http://www.raphisme.ch), la philosophie artistique de Raphaël Julliard !

Arrivés à Crimée, près d’Aubervilliers, dans le paysage désolé et le béton ensoleillé, on a pris quelques munitions au supermarché… avant de s’engouffrer dans le parking. On a pris les escaliers, descendu des marches et des marches et encore des marches… ça sentait l’essence, l’huile de moteur et l’urine.
Très étrange. On se rendait au 4è sous-sol et le suspens était à son comble : quand verrais-je apparaître LA voiture ? L’œuvre d’art sur quatre roues ! On traversait une suite interminables de couloirs gris, des boxes de béton succédaient à d’autres boxes de béton, des perspectives de rideaux de fer s’ouvraient devant nous.
Seule ici, je n’en aurais pas mené large !
Puis soudain, Raphaël s’est arrêté, a fait jouer ses clés, le rideau de fer s’est levé… et là, le bijou d’acier brossé, la DeLorean en personne, nous est apparue. Dans la semi-obscurité, rangée dans son box, elle dévoilait certains de ses charmes. Une vraie splendeur. J’ai tourné autour, et puis je me suis glissée derrière le tableau de bord. Assis au volant, le pilote a fait tourner la clé… elle n’avait plus qu’à démarrer pour qu’on décolle.
Mais… mais… mais… on a eu beau insister, en rêver, la prier, trépigner, la brusquer… cette chienne d’acier n’a jamais voulu bouger. Si belle… et si capricieuse !
Je suis repartie avec l’impression qu’on m’avait volé la fin du film !
Mais je me suis cassée en me promettant que le 06 septembre prochain, Rue Saint-Claude, quand ce fantasme mécanique serait de sortie, je ferai tranquillement mon tour à son bord.

Et le 06 septembre… avec Raphaël, j’ai opéré mon tant attendu « Retour vers la DeLorean » !
Je suis redescendue dans les couloirs du métro en direction de Crimée. On a refait surface au milieu de nulle part pour manger un steak-frites en terrasse d’un bou-boui, face à un splendide supermarché et à un immense garage.
Arrivés au parking, on est redescendus dans les ténèbres. 4 niveaux sous terre. A nouveau les odeurs d’essence, d’huile de moteur et d’urine… les boxes de béton à répétition.
Tout ça en accéléré, avec un suspens… toujours à son comble ! Va-t-elle ou non démarrer cette fois ? Sera-t-elle là, prête à nous en mettre plein la vue?
Raphaël relève doucement le rideau de fer. On se glisse dans la carcasse métallique. On fait corps avec le cuir des sièges. Il tourne la clé du moteur pendant que mon cœur bat la chamade à l’idée de voir enfin décoller l’engin. Je m’attends à ce qu’elle rugisse aussi sec, qu’elle fasse exploser ses 130 chevaux de rage. Au lieu de ça… on a une impression de déjà-vu. Elle moufte à peine. Elle couine. Tout ce qui s’en échappe, c’est un pauvre miaulement, un son enroué, un ronronnement voilé.
Pas question pour elle d’aller plus loin que ce fouttu parking où elle a déjà passé plusieurs semaines en captivité ! Elle a décidé d’y finir ses jours on dirait! C’est un suicide machinique. Une sorte de syndrôme de Stockolm mécanique. Elle : pas bouger ! On recommence le jeu de la clé… on y va en douceur. On lui caresse le moteur à l’arrière. On lui parle avec chaleur à l’avant. Rien à faire. Son conducteur frustré en est le premier étonné. La dernière fois, c’était un problème mécanique. Depuis, on a fait venir un de seuls chirurgiens Français spécialisés en DeLorean. Il l’a remise sur pied, l’a reboostée ! Elle est en pleine santé ! Le plein d’essence a été fait. C’est juste qu’elle a l’air de se plaire là où elle est. Un ultime caprice de la dame d’acier !
A l’issue de 20 longues minutes d’attente, d’essai, de prières incessantes… son enrouement finalement disparaît et, comme par magie, elle démarre ! On peut alors s’envoler vers un monde plus lumineux.
Il est temps de la remettre en beauté. Petit washing-machine rapide.
Etendue dans ce cockpit d’acier, je regarde les rouleaux savonneux aller et revenir sur la carcasse métallique, s’abattre sur le pare-brise, l’asperger d’eau, l’envelopper d’un souffle chaud. Une féerie presque enfantine ! 10 mn d’une chorégraphie mousseuse… et le pilote prend enfin le volant à travers Paris pour nous mener Impasse Saint-Claude, et voir cette caisse se transformer en véritable galerie d’art toutes ailes déployées.
Une tranche de rêve en plein centre des vernissages de la journée. Trois artistes, trois drôles de Dames se sont chargées d’y présenter leurs œuvres.
Parmi elles, Elena Montesinos (http://www.mamco.ch/artistes_fichiers/M/montesinos.html) a étalé son sound-system spécial vernissage noisy: le son est diffusé grâce à de mini-enceintes Marshall disposés en croix sur le capot arrière, près du moteur.

Juste à côté, la Galerie Perrotin vernit Sophie Calle : cette dernière a collaboré avec la voyante Maud Kristen pour sa dernière expo intitulée « où et quand ? ». Embarquée dans le Nord de la France et suivant à la lettre les instructions de Maud Kristen, l’artiste est entrée en collision avec son futur et fait d’étonanntes rencontres… Tout ce qui fait signe a donc été rapporté par le menu à travers une série de photos et de commentaires. Presque un roman-photo. En face, dans l’autre espace de la Galerie Perrotin, c’est du design : Robert Stadler, ex Radi Designer, y présente une série de sièges composés de modules qui ont des airs de galets. L’impression de s’étendre dans un désert marin n’est pas pour me déplaire mais il faut continuer la course à travers les galeries et les interviews.
Dans la soirée, entre deux tournages avec Vladimir Tybin (www.notforproduction.net), on se pose deux minutes entres les deux espaces de la galerie justement… et on assiste à un étrange défilé : Claude Berri, Stephan Eicher, Jack Lang et sa femme… tous les amoureux de l’art sont-ils là ? Mazarine Pingeot aussi ? OK. Et Patrick Timsit? Là, on tombe des nues. C’est quoi ce bug dans le casting ?

Un peu plus haut dans la rue, chez LH, je fais la connaissance d’une jeune commissaire d’expo : Lindsay Hanlon. Non, ce n’est pas Lindsay Lohan cachée derrière un anagramme! C’est la commissaire de l’expo « You can’t hide your love forever » qui réunit des artistes de Glasgow. Je flashe sur une artiste inconnue au nom imprononçable : Hrafnhildur Halldorsdottir ! L’artiste ne manque pas de talent mais a besoin d’urgence d’un pseudo. Ici et là, des bouts de papier pèlent sur le sol, ils ont été raturés jusqu’à prendre des airs de lambeaux de cuir. Quant à ses fresques assorties d’objets étranges, elles ont quelque chose de très mystérieux. Ça nous ramènerait presque aux frontières des œuvres de James Lee Byars. Un parfum de secte, d’étrange rituel ou d’organisation secrète s’en échappe. A suivre en tout cas!

Juste en face, Frank Elbaz nous invite à douter avec « Lure », autrement dit « Leurre » en français. Une expo collective. D’entrée, un type se tape la tête contre les murs, là ? Non ! c’est un Daniel Firman ! Mais que fout ce balai au milieu de l’expo ? Ils n’ont pas terminé l’accrochage ou quoi? Pas du tout, ce vulgaire balai est serti de pierres précieuses ! Il a bien plus de valeur que, ces pierres qui luisent comme de précieux joyaux : ils ont en fait été taillés dans le gravier le plus trivial. Par contre, ces deux vis qui semblent avoir été oubliées dans le mur pendant l’accrochage… sont en fait de véritable œuvres en or massif. Et dans la vitrine, quelqu’un semble avoir oublié une valise d’acier. Il suffit de la retourner : c’est une véritable toile tendue sur un chassis. Une œuvre hyperréaliste. Bref, le trompe-l’œil est réactualisé dans la galerie et on se fait avoir avec le sourire.
Chez Polaris, Samuel Rousseau donne dans l’introspection et on reste interdit devant un arbre qui, inlassablement, perd ses fleurs, puis bourgeonne, et fleurit… et recommence. Une ombre projetée et une projection qui nous retiennent par leur simplicité poétique.
Pour traverser, passer de l’autre côté de la Rue de Turenne, je monte sur le longboard de Bertrand Planes… et je glisse jusqu’à la Galerie Nuke Rue Sainte Anastase. Là, la nuit à peine tombée me permet d’entrer dans la vidéo très forestière de Keja Ho Kramer. Et dans la galerie, à l’intérieur, toute une série de photos de paysages en noir et blanc nous permettent de respirer : on est au milieu des arbres, dans les sous-bois, on suit les lignes des branches, des feuilles, des ramifications entremêlées et des troncs nervurés… c’est du dessin à l’échelle de la nature, dans un contexte atemporel. Un temps arrêté. Stefan Sehler chez Baumet-Sultana m’a procuré des sensations proches : la nature reprend-elle ses droits dans les galeries ?
La mienne réclame une pause immédiate.
On décide de stopper un peu les tournages enchaînés non stop toute la journée, Vladimir et moi. On se pose au « Progrès », en attendant de nous rendre au dîner de la Galerie Perrotin.
Je note rapidement tout ce que j’ai vu. L’exposition de Nicolas Ledoux chez Magda Danisz : un détournement humoristique de toute l’histoire de l’art : de L’Urinoir de Duchamp à la série des Cremaster de Matthew Barney… tout le monde en prend pour son grade. Du dessin, de la peinture, on en manque pas… Qubogas chez Anne Barrault. L’univers fantasque de Marke Freess chez Eva Hober. Chez Alain Gutharc : Marlène Mocquet et ses toiles peuplées de bestioles surréalistes.
Et pendant que j’inscris le déroulé de ma journée, Vladimir pianote des trucs sur son Nokia… et de temps en temps me pose une question.
- Est-ce que tu peux faire entrer quelqu’un dans ton dîner ultra-fermé ?
- Hummmm… depends on ! Rien n’est impossible. Les Stones sont déjà là. Si c’est David Bowie, peut-être ! Ou Jude Law peut-être.
- Et Alister ?
- (sourire amusé) Quoi ? Le chevelu avec qui j’ai déjà passé tout mon été… à écouter en boucle son CD?
Pas question ! Il n’est pas assez connu… non, je déconne ! Bon, OK, mais à condition qu’il ne chante pas ou qu’il invente de nouvelles chansons parce que je connais déjà tout son premier album par cœur!

En fait, qu’il chante ou non, j’aurais eu du mal à dire non ! Comment refuser quelque chose à Vlad ?
Il avait rencontré Alister quelques jours plus tôt au « Festival de la Loose » … un raout en plusieurs volets organisé par le Syndicat du Hype (SDH : www.syndicatduhype.com). Encore un coup de notre looser-en-chef national, Thierry Théolier… un autre énergumène au système pileux fort développé. Concerts, lectures et autres perf faisaient partie de ce festival sauvage organisé aux Buttes-Chaumont ! Sur une peau de tigre encore vivante, dans un kiosque de pierre improvisé, Alister avait chanté plusieurs titres. C’est là que Vlad lui avait proposé une interview à programmer ultérieurement.
ET c’était ce soir-là, ce samedi plein d’art et de turbulences ou jamais !

Une demi-heure plus tard, Alister rappliquait. Et un quart d’heure plus tard, Vlad était en plein tournage en direct de la Galerie Emmanuel Perrotin… dont on a fait la fermeture !
On aurait pu prendre le chemin du ChaCha… mais non ! Et avec ces deux olibrius, il valait mieux se mettre au rythme de la loose sans attendre…
Alors, j’ai poursuivi avec eux ce chemin de loose pavé de bonnes intentions, de confettis effervescents, d’éclats de rire taniques, de moments d’égarements et d’étincelles électriques… Jusqu’à 7h du matin ? Ou du soir ? Je ne me souviens plus très bien ! Je ne me souviens pas de tout de toute façon.
Mais tout ce que je sais, c’est qu’une fois de plus, j’ai réussi mon pari quotidien, celui qui me tient depuis le lycée : faire de ma journée une œuvre d’art !
D’ailleurs, même les chemins de la loose peuvent y mener parfois : Thierry Théolier est au courant il paraît!
Anaïd Demir

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