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******************************* Anaïd is… Anaïd forever ******************************* Née à la Saint-Hubert patron des Chasseurs, élevée à l'acide, gouvernée par Mars et Pluton, habitée par le démon de l'écriture, rongée par la passion

mercredi 18 novembre 2009

Episode 76

Samedi 24 octobre

Comment capter l’attention d’un acteur ? Il suffit de braquer sur lui une caméra !
J’ai essayé sur Nader Boussandel dans la soirée hier, ça marche à fond !
Il fait partie de la bande d’Edouard Baer et vient entre autres de finir un film intitulé « Les Barons ». C’est un proche de Nova. Du Djamel Comedy Club… etc, etc. Bref, un personnage à suivre, pétillant d’humour mais pas lourd !
Après ma chronique dans l’émission de Juan, je suis allée boire un verre avec Fadia dans son QG et elle m’a soufflé ce secret de polichinelle : le coup de la caméra !
Nader était déjà là. Bizarrement, pas encore pendu au téléphone… et puis ça n’a pas tardé : au bout de 10 minutes, son objet transitionnel avait sonné et il sortait avec !
Du coup, je n’ai pas résisté : je l’ai suivi dehors, le long des trottoirs qu’on allait arpenter ensemble pendant vingt bonnes minutes. Je ne l’ai pas lâché. Moi matant ces faits et gestes à travers l’écran. Lui la main à l’oreille, tournant sur lui-même, revenant sur ses pas et repartant, indéfiniement.
J’ai adoré.
Ma HD a tout enregistré. Au début, il ne capte pas ma présence. Il ne me voit pas. Puis soudain il m’aperçoit, détourne le regard puis carrément m’ignore. Au bout de 3 minutes, il se demande quand même si mon petit jeu va durer longtemps. Un léger froncement de sourcil en guise de point d’interrogation, il commence à paranoïer 20 secondes durant : « Est-ce qu’elle entend ce que je dis ? Est-ce qu’elle compte l’utiliser contre moi ? C’est quoi ? Une caméra cachée ? Un piège ? Est-ce que je dis des trucs compromettants ? ».
On peut d’un coup voir toutes ces interrogations partir en fumée dans l’atmosphère. N’ayant rien à se reprocher, il continue sa conversation tranquillement.
J’ai gardé une distance raisonnable tout le long de l’expérience. Installée sur le capot d’une Clio, j’ai vécu comme un tour de manège au cœur d’une personnalité à gagner.
A la limite, la caméra n’aurait pas été branchée, c’était pareil.

Mais c’est pour « FIAC ME, I’M FAMOUS »… forcément.
Même si on n’etait pas dans un cadre artistique, c’est une œuvre en soi. Pas uniquement une recherche sur le comportement humain.

Là où ça commence à devenir une sorte de recherche scientifique, c’est quand je la caméra se dirige sur une sorte d’extra-terrestre en plein Bal Jaune : Grichka Bogdanoff !
Et il est très mal entouré car le type à ses côtés qu’il prend sans doute pour son ami ose me dire qu’il loue Grichka 10 euros du quart d’heure !
Même en blague, je ne trouve pas ça rigolo. Faut vraiment avor une morale de maquereau pour sortir ça en plein Bal Jaune à une simple journaliste gonzo totalement désintéressée ! Seuls les crétins pensent que dés qu’une caméra déboule, c’est TF1 !!
J’ignore donc ce personnage véreux que Grichka se traîne et pose directement quelques questions au principal intéressé. Impossible de me concentrer sur les réponses pourtant. J’ai l’impression, sans cesse, que la caméra est trop près. Je n’arrive pas à faire les réglages et pourtant, j’ai la main désormais. Plusieurs jours de pratique à mon actif.
Mais il y a un vrai problème. Je ne parviens jamais à cadrer entièrement Grichka. Une fois c’est le front qui n’entre pas dans le cadre, l’autre fois c’est le menton… et quand j’arrive par miracle à avoir les deux joues en même temps, je ne vois plus les yeux.
J’en suis à me demander si je ne suis pas en train de filmer un alien… A force d’avoir parlé de sciences, de SF et de phénomènes paranormaux, je suis en train de me demander si les vrais frères Bogdnaoff n’ont pas été enlevés par des Extra-terrestres et remplacés par des êtres aux mœurs étranges qui leur ressemblent mais ont le menton et les joues qui poussent…
Enfin… en tout cas, je l’interviewe mais sur « Souvenirs from Earth», c’est comme sur la Lune, dans un « Temps X » (du nom de l’émission des vrais Frères Bogdnaoff dans les années 80) : il n’y a pas de langage décodable par les Terriens sur cette chaîne, c’est une sorte de galimatias universel qui est d’usage. Du babylonien sonore. Le visuel parle pour le reste.
Du coup, en mettant mes interviews au ralenti, j’arrive à un langage quasi lunaire. Quelque chose de réellement suspendu dans le temps. Dans les conditions du Bal Jaune, ça tombe bien.

Mais passé le cas du langage, le mystère Bogdanoff reste entier.
Il doit y avoir des forums de discussion entiers concernant ces jumeaux du PAF sur le Net !
Dans mon entourage immédiat, certains disent qu’ils ont tous les deux la maladie d’Elephant Man (Non Lynch n’a pas inventé l’histoire !) et qu’ils ont tous les deux des excroissances et que bizarrement, localisées uniquement sur le visage, ces excroissances évoluent symétriquement chez l’un comme l’autre. Ce qui paraît impossible à d’autres car, par leur nature même, les excroissances ne peuvent pousser symétriquement !
D’autres encore prétendent qu’ils ont contracté la maladie qu’on atrappe dans le show bizz et qui fait qu’au moindre bouton et à la moindre angoisse, on a un chirurgien à portée de civière.
Cette pathologie est aussi appelée communément « syndrôme de Jackson », en hommage à notre défunt Michael.

Orlan, quant à elle, elle ne tergiverse pas. Elle assume et même davantage, elle soutient. Elle a deux excroissances sur les tempes. Deux bosses. Sûrement des implants de silicone qui la rendent post-humaine depuis belle lurette. C’est la Renaissance transposée au temps du High-Tech.
Et quand elle voit une caméra, elle joue le jeu, elle se laisse capturer et personne ne réclame 10 euros du quart d’heure dans son dos pour avoir le privilège de lui poser 3 questions !
Et des trucs à dire, elle en a. Elle se prête avec plaisir aux interviews. Et ce matin, elle a longuement discuté avec un officiel du Ministère. Ça m’a fait de très belles images. Je commence à avoir des réflexes télé !

C’était juste après la remise du Prix Marcel Duchamp !
Et parenthèse : c’est bien Saad qui l’a obtenu ! Quand vais-je me décider à devenir bookmaker ?

Oui, donc… Orlan : ses tempes, sa coupe de cheveux bicolore, ses tenues assorties… il y a toujours de l’harmonie.
Et quand on lui parle de son visage, elle n’a pas peur d’aborder les questions de chirurgie, de beauté et de canon de beauté… elle a été précurseur dans les années 70 face à toutes ces questions.
Et sur la table d’opération, elle n’a pas plus peur des caméras que des coups de scalpel et bistouri -sous anesthésie tout de même !

Son travail est généralement bien moins superficiel que la plupart des gens veulent bien le croire. Elle va loin finalement dans la mise en danger de sa personne, elle met son corps, son physique au service d’une idée… ce qui n’est pas rien aujourd’hui, dans un monde où le paraître à une telle importance.
Elle a le nez de telle Vénus, la bouche de tel Adonis… elle est un patchwork des canons de beauté de toute l’histoire de l’art à elle seule.
Il faut croire que toute la société actuelle est sur ses traces. Car la plupart des gens, en cherchant à s’embellir, prennent en fait un forfait pour la monstruosité. Et le plus étrange, c’est que tous ces êtres passés entre les mains des mêmes Frankenstein ont tous l’air clonés.
Au moins, en passant sans cesse sur le billard et par des gestes radicaux, Orlan a remué les consciences.
Et si elle a eu recours à la chirurgie, ce n’est pas pour ressembler à une bête curieuse -même si parfois on peut se l’imaginer- mais pour nous interroger sur ce qu’est le physique, l’apparence… et braver les limites du corps.
D’ailleurs, elle a une expo perso en ce moment-même que je n’ai toujours pas vu à l’Abbaye de Maubuisson.

Et comme c’était la journée des corps, du physique, de la morphologie et même de l’anthropomorphisme hier, avec Fadia, on a enchaîné sur l’expo de Huang Yong Ping chez Kamel.
Nader et Vito devaient nous y retrouver mais ils se sont directement retrouvés -je ne sais par quel raccourci- dans le buffet des Beaux-Arts sans même passer par l’expo dans la chapelle !
D’impressionnants animaux empaillés dans la galerie d’abord… le périple se poursuit dans la chapelle des Beaux-Arts où l’artiste a mis en scène une impressionnante Arche de Noé calcinée… entre feu et déluge, qui l’emportera ?
Où en est l’humanité ?
On peut aller loin dans les métaphores : pendant que la France d’en haut flambe, celle d’en bas prend l’eau et ne sait pas toujours nager. La réflexion s’est donc étonnamment poursuivi au Bal Jaune, où habillée à peu de chose près comme hier et avant-hier, je me suis perdue en pleine science-fiction !

vendredi 13 novembre 2009

Episode 75 : FIAC ME AGAIN

Vendredi 23 octobre

Lever de plus en plus difficile. Je sais à peine quel jour on est et comment je m’appelle.
Je sais juste que je me suis achetée un tas de fringues que j’adore à London et que je me retrouve à porter mes hardes des années 80 (ou presque) depuis 3 jours. Obligée d’aller m’acheter des leggings, des chaussettes et des petites culottes dans des boutiques à la gomme alors que je suis à découvert et que j’ai déjà tout ce qu’il me faut en high-figh à la maison !!!!
Pour les shoes, je m’en suis occupée dès le deuxième soir avec Myrtille, sur les Chanzel, en sortant du bureau de « Souvenirs », sous une pluie battante. Remplacées. Il y avait urgence.

C’était juste après ce moment génial où Marcus a fait sauter tout le système d’envoi des mails de tout le bureau parce qu’il avait spammé à donf’ l’info « Fiac me… » à tous ses contacts!
Du coup, même la prod’ de Cerrone qui nous héberge amicalement, ne pouvait plus envoyer le moindre mail… tout le monde était subitement en « vacances » Internet et il n’était que 15h30 ! Marcus était tellement mal qu’il s’est cassé discrètement sans crier gare ! On a juste entendu une grosse moto démarrer en trombe dans le triangle d’or parisien !
Au même moment, au même endroit, Bernard regardait un pot de Nutella lui faire les yeux doux. Succomber ? Ne pas succomber ? Négocier avec le désir ?
Au même moment, dans la cuisine des mêmes bureaux, je prenais une bonne cuillère de miel des champs… sentant déjà la grippe me gagner.
Puis avec Myrtille, je sortais de là, chaussée de mes Repetto qui n’en pouvaient plus de la pluie et je partais en quête de shoes taillées dans un coupon de cuir neuf avant le premier vernissage de la FIAC 2009.

Depuis ce moment, j’ai l’impression qu’il s’est passé un siècle ou deux!
D’ailleurs je confonds les jours. Je ne suis même pas sûre d’être vendredi. Je me sens comme un samedi.
Mais ça ne peut pas être samedi. Samedi, c’est le jour du « Bal Jaune »… C’est demain ! Et je compte bien faire un passage-éclair à la maison pour récupérer une tenue! En plus avec tous mes changements d’adresse cette année, mon invite s’est perdue ! Je n’ai pas eu le fameux morceau de moquette en forme de carton d’invite et je ne saurais dire de quelle couleur il a été prévu pour moi!

Si donc on est bien vendredi, demain matin, on devrait savoir qui a remporté le Prix Marcel Duchamp… on verra si j’ai parié sur le bon cheval en pensant à Saad et si Saad m’a fait penser au Prix. Et le soir-même, on se rendra au Bal Jaune et comme ça créera des courts-circuits dans nos têtes entre Bal Jaune et donc le Prix Ricard et le Prix Duchamp, on se demandera toute la journée et aussi le lendemain, qui est le gagnant… qui est le gagnant… qui est le gagnant… Duchamp-Ricard : une partie d’échecs se jouera dans nos têtes comme chaque année. Ces deux-là, Duchamp et Ricard, s’ils avaient été contemporains, s’ils s’étaient connus, se seraient-ils entendus ? Qui sait !
En tout cas, pendant la Fiac, c’est chaque année échecs et mat, c’est comme ça. J’ai quand même du mal à superposer l’échiquier et le bob Ricard. Mais je suis fair-play : je me dis « pourquoi pas? ».

Et en parlant de Duchamp, j’étais donc hier jeudi, dans le Marais. Chez Michel Rein, là où se déroulait une performance de Saad Afif liée à « Vice de forme », l’œuvre présentée pour le Prix… Ricard ? Mais non, non et non, bordel, c’est le Prix Duchamp ! Marcel Duchamp !
Bon, en tout cas, un pianiste jouait des morceaux au piano, des compositions qui pouvaient accompagner les paroles des chansons écrites par diverses personnes à Berlin pour Saad.
Puis j’ai repris ma caméra dont je m’étais trop longuement séparée pour rejoindre Héloïse, Grégoire, Audrey, Jérôme et quelques autres chez Emmanuel Perrotin. C’était pour le vernissage de Jean-Michel Othoniel et Farad Moshiri. Un livre fantastique tout en pop-up -de la 3 D qui nous renvoie en enfance- paru chez Dilecta, accompagnait l’exposition de Jean-Michel. je lui ai demandé de tourner les pages du livre pour les besoins de mon film. J’en ai quasi ignoré José Lévy, le designer qui fait lui aussi partie de la galerie. Je me suis ratrappée avec Thomas qui a improvisé une perf autour d’une œuvre de Jean-Michel rien que pour ma caméra. Une ronde autour d’une œuvre tout en courbes et en rondeurs.
Quant à la star de l’art contemporain Iranien, Farad Moshiri, il présentait des grands formats abstraits ou figuratifs dans lesquels la matière et la sensualité l’emportent sur le tout.
Le dîner, dans le show-room d’Emmanuel, m’a rappelé les dîners de vernissage des années 90… A ceci près qu’on était toujours entre amoureux de l’art contemporain à l’époque et qu’on était rares, donc peu nombreux.
A cette époque-là, il n’y avait pas le moindre chanteur ou le moindre fashion designer… ou alors ils n’étaient pas au top de leur carrière, seulement en devenir. Là, il y avait Stéphane Eicher et je me suis demandée s’il m’avait reconnue. J’avais essayé de l’interviewer l’année dernière lors de Paris Photo dans la Pyramide du Louvre. J’avais insisté, je lui avais offert un magazine, fait de très larges sourires, expliqué mon travail…
Cette fois, c’est lui qui m’a rendu de larges sourires alors que je cherchais une table pour m’installer. Mais il était à côté d’un personnage qui sentait le souffre et le plomb, et il n’avait pas l’air de s’amuser. Alors j’ai évité. Mauvaises vibes, et pourtant, il n’en bougeait pas. Il restait là, à côté de Sophie Calle, comme prisonnier.
Il y avait une super ambiance et je présentais Héloïse à Grégoire. Héloïse travaille avec Emmanuel depuis peu et est surtout une de mes amies de fac, en histoire de l’art. Quant à Grégoire, c’est le fondateur des éditions Dilecta.
Ces deux-là s’étaient croisés plusieurs fois sans savoir qu’ils partageaient ensemble mais aussi avec moi, un être qui nous a été chèr avant de disparaître subitement de nos vies en 2002 à l’âge de 33 ans: Alain-Guillaume Poirier.
C’était le cousin de Grégoire, c’était mon ami et celui d’Héloïse dès nos premières années de fac. On l’a évoqué ce soir-là, il était palpable dans ce vernissage j’imagine. Et puis on a évoqué ce lien et ça nous a ramené à la vie.
J’avais la bougeotte, j’allais et venais entre le dance-floor au rez-de-chaussée de Piotr Uklanski et le premier étage… puis je rencontre Géraldine qui a elle aussi la bougeotte. Malgré la pluie, on décide d’explorer la nuit et d’aller dans cette soirée de vernissage de *La Bank* au Hustler !
Est-ce le repère de Hugh Heffner ? Non, le créateur de Playboy est plus raffiné que ça. Les Bunnies n’ont rien à voir avec toutes ces putes disséminées dans l’espace de ce club. J’ai jamais vu un endroit aussi pourrie. Autant de nanas laides mais à poil prête à faire un tour aux toilettes avec le premier lourdeau qu’elles croisent. Brrr, drôle d’atmosphère. On dirait les pages d’un fanzine échangiste, un fascicule fait maison avec des photocopies pourries et de la chair mal emballée! Qu’est-ce qu’on fout là ? Seul l’adorable Greg, en bas, le mec qui vend les bonbons et autres indispensables de soirées, m’est agréable. Il m’offre une sucette et on tape la converse… ça doit pas lui arriver souvent de parler ici. Je prends mes jambes à mon cou et je me caaaaaaaaassssssssse de là ! C’est même pas drôle. J’aurais dû aller au Montana. La soirée gothique du « Baron » ? Pas question… et d’ailleurs, j’étais en costume de marin… faut-il le rappeler ?

Ça c’était hier -donc jeudi ! Un jour où je n’ai pas fouttu les pieds à la FIAC. Je ne pouvais pas. J’avais un texte de catalogue à écrire un en urgence.

Et là, on est donc vendredi… vendredi donc… et la journée est bien pleine. Je continue à cultiver mon de don de triquité et faire plusieurs trucs à la fois.
Je crois que je vais à nouveau faire abstraction de la Fiac toute l’après-midi pour m’intéresser au « Nouveau Festival » aujourd’hui, un événement qui met la performance, le spectacle, la chorégraphie -bref tout ce qui est in vivo- au centre du Centre (Pompidou) de Paris.
Et à 18h30, c'est-à-dire dans une heure, je retrouverai Juan à l’antenne de Nova pour lui parler de tout ça.
J’ai commencé par un rendez-vous avec Albane, une Claudinette (les hôtesses de l’art de chez Claudine Colin Communications !), à la Conciergerie pour « Le sort probable de l’homme qui avait avalé un fantôme ». Sujet, verbe, complément : c’est le titre de l’expo…
Pour ceux qui n’auraient pas encore pigé, c’est fini le temps du titre d’expo en moins de 10 caractères et qui ne veut pas dire grand chose. Aujourd’hui, ça doit occuper l’espace d’un sms et faire dans les 800 caractères ! Sinon, ça ne sert à rien. Désormais, le titre d’expo fait donc dans la phrase à rallonges, dans la citation, dans l’essence poétique, bref dans le sens pour éveiller LES sens… puis dans le rythme et dans le mouvement !
Ça ne pouvait pas échapper à un danseur et chorégraphe de talent promu commissaire d’expo à cette occasion : Christian Rizzo.
« Le sort probable de l’homme qui avait avalé un fantôme » se tient dans la salle des gens d’armes de la Conciergerie, et le titre tout en rondeurs vient adoucir la vocation de ces lieux attenant au Palais de Justice.
Au fond, à gauche, une armée de fantômes semble se diriger vers nous : un Olaf Breuning qui, entre Halloween commercial et épouvante, nous met tout de suite au parfum.
On serait donc à nouveau transposé dans un mystérieux château bien évidemment hanté comme beaucoup d’expos en ce moment… La partie de Cluedo est avancé. Où est l’objet du crime ? Qui sera la victime ?
On est directement entraîné au pied d’un catwalk et dans cette magnifique architecture du Gothique Flamboyant, entre voûtes en ogives, colonnes et rosaces, on a le sentiment d’être convié à un défilé. Mais en lieu et place des mannequins présumés, il y a des œuvres autour desquelles le spectateur défile.
Des œuvres figées dans leur mouvement, liées au corps, à la danse. Sensuelles.
Les époques se croisent comme dans cette sculpture de Folkert de Jong inspirée par la célèbre « Danseuse » de Degas : on croirait presque à une copie, sauf qu’il suffit de s’approcher pour se rendre compte que la grâce n’appartient pas qu’aux femmes dans l’univers de la danse classique. Voici un homme qui porte parfaitement bien le tutu !
En T-shirt et baskets, on a une sculpture de « Cédric » ! Tomoaki Suzuki réalise lui des scuptures hyperréalistes mais en format réduit : c’est une sorte de Duane Hanson Japonais de moins de 35 ans. Et puis dans un trop plein de consommation qui va jusqu’à l’écœurement ou du moins l’effet surplus, on a un mannequin de Daniel Firman dont on ne sait s’il croule sous ses vêtements ou s’il en renaît. Un mouvement quotidien est répété ici à l’infini. C’est la superposition des jours.
Et peu à peu, la grâce dérive vers quelque chose de plus animal : la créature de MarnieWeber issue de la Planète des Singes a quelque chose de si humain. Elle prend la pose dans ses vêtements fashion, presque hautaine. Les statuettes fluides, aux poses simples et aux silhouettes racées de Don Brown. Un Xavier Veilhan.
Côté fétichiste, on retrouve les sculptures de verre de Jean-Luc Verna. Puis les pièces animales et précieuses de Bruno Pelassy dans lesquelles le vison croise par exemple le python. Et aussi les incroyables shoes de Benoît Méléard, faîtes pour la scène plus que pour la marche et qui ont le don de métamorphoser la silhouette et réinventer la démarche. Escarpins vertigineux mais sans talons, carrés, ronds… on ne sait pas par quel bout les prendre ni où se camoufle le pied dans tout ça. Des œuvres en soi.
La mode, la grâce, l’harmonie, le mouvement, le corps… c’est tout cela que l’on retient de cette expo.
La danse est encore plus présente avec la vidéo d’un ballet de Merce Cunnigham mis en costume par Rei Kawabuko… Comme des Garçons !

Mais moi, j’ai envie de scotcher sur un de mes artistes préférés. Un de ceux qui sortent du lot dans l’expo : le perfectionniste James Lee Byars qui fait son grand retour en ce moment dans la mémoire des gens. C’est comme si on redécouvrait ce grand perfectionniste, un peu mystique, plutôt perché des seventies. Il fait aussi partie d’une expo au musée d’art moderne, « Deadline », qui fait la part belle à tous ceux qui ont été amenés à se dépasser parce qu’ils ont eu une vraie « dead line » dans leur vie, au sens propre du terme. De ces dead lines qui lorsqu’elles vous pendent au nez vous poussent à sortir vos tripes, dans l’urgence, avant de disparaître à tout jamais. Un art au bord du précipice donc.
Et pourtant léger, spirituellement engagé, matériellement ancré. A se demander comment cet artiste a pu naître à Detroit alors qu’il est autant empreint d’Orient, de philosophie. D’ailleurs, il a longuement vécu au Japon. Et à mon avis, ce n’était pour assister à des combats de Sumo !
En tout cas, sa dead line a été franchie en 97 au Caire. Avant cela, la feuille d’or était l’un de ses materiaux préférés et la performance, l’un de ses modes d’expression les plus chèrs. Ici, on retrouve ce qu’on appelle un « bonnet rouge », une traîne de soie qui a été l’objet d’une performance que l’on imagine proche du bouddhisme. C’est un rouge festif et léger.

Une traîne rouge que je gonfle mentalement d’hélium, pour monter dessus et foncer vers Beaubourg où m’attend Serge Laurent (qui s’occupe du « Spectacle Vivant » du Centre) pour une présentation express du « Nouveau Festival ».
On était synchro. 16h pile. Le tour des lieux. Un centre qui renoue avec ses origines, l’esprit des seventies. La performance. L’ouverture sur toutes les disciplines, la gratuité. La surprise. L’accident heureux.
Et c’est tout ce qu’il vient de me raconter que je dois résumer tout-à-l’heure à l’antenne de Nova. Le « Beaubourg-la-Reine », l’installation de Sophie Perez et Xavier Boussiron où sont conviées des artistes, des performers, des musiciens, des comédiens… pour un grand bœuf généralisé tout un mois durant. Philippe Katerine, Eric Duyckaerts… et bien d’autres choses. Des écrans qui se croisent, des scène qui se montent, des espaces à explorer, des danseurs qui repètent, des éclats de voix… de quoi s’émerveiller pendant un mois et sans doute toiser la « Crise » !

lundi 9 novembre 2009

Episode 74

Jeudi 22 octobre 2009

Ça sent un peu les vacances de l’art cette année la FIAC pour moi.
Je suis libre de regarder les œuvres comme je veux… et si j’ai envie de les ignorer, je peux !
Ma mission: me concentrer sur les gens. Un vrai régal ! Les looks, les sensations, les couleurs, le who’s who, les interactions relationnelles… Psychologie, sociologie, philosophie… tout est permis. Même passer toute la Fiac dans le VIP lounge du Grand Palais si je veux. Et d’ailleurs, je veux.
Pour le vernissage, hier soir, dans le VIP, j’ai collé Xavier Veilhan et Julie Rouart installés dans un canapé à l’abri des regards.

Le problème, quand on connaît les gens qu’on filme, c’est qu’ils vous offrent une coupe de champ’ et vous intègrent à la conversation. Que vous ayez une vraie caméra pointée sur eux ou un joujou Fischerprice, voire une brosse à dents… c’est pareil.
Euh ? je viens de dire que c’était un problème ?… pfff, n’importe quoi, j’adore ça ! Pas le Champ’, la connexion, la relation établie.
Est-ce que ça s’appelle « coller » d’ailleurs ? J’ai fait ça des tas de fois : m’asseoir et discuter avec des gens que j’aime.
J’ai d’ailleurs continué avec Wim Delvoye… mais l’ai-je filmé ? Pas sûr ! En plus, la conversation était trop perso.

Pas sûr non plus que j’aie filmé Melvil… pour d’autres d’autres raisons encore.
Il faut dire que c’est lui qui est venu me voir spontanément. Parce qu’on se connaît un peu et qu’on s’aime bien.
Evidemment, je ne lui ai jamais dit que j’avais passé plusieurs années à rêver de lui par épisode comme une midinette, et que d’épisode en épisode et de nuit en nuit, on s’entendait toujours mieux.
En tout cas, on a déjà passé un dîner de vernissage à papoter et on a pas mal d’amis communs… mais non, je ne l’ai pas filmé. C’était un instant qui m’appartenait. Un moment perso. Un temps suspendu. Presque intime. A quoi bon filmer ça.
De toute façon, j’étais incapable de mettre la caméra en marche sur le moment. J’étais sur une autre planète où je lui parlais de Hotmail. Parce qu’il y a moins d’un mois, je me suis retrouvée chez un de nos amis communs et qu’en me connectant à Hotmail, je suis tombée sur son adresse… preuve qu’il avait consulté ses mails juste avant moi, au même endroit. Est-ce que j’ai maté? Pas du tout ! Quelle horreur ! Je préfère les confidences.

Et puis par contre, j’ai laissé Marcus filmer ma discussion avec Jean-Charles de Castelbajac dont j’admire le travail mais aussi le personnage… un vrai passionné d’art à mon avis. J’ai adoré son exposition au Musée Galliera il y a quelques années. En plus de mettre en scène ces créations dans ce château reconstitué ou plutôt suggéré, avec pont-levis, murs tapissés et armures habitées, il avait convié des artistes qu’il suit de près. Et c’était franchement pointu. Digne de quelqu’un qui est connecté à son époque.
Il a un véritable univers. Ce n’est pas quelqu’un qui pose. Je m’en suis rendue d’ailleurs rendu compte il y a deux ou trois ans lorsque j’ai fait partie avec lui d’un jury, celui du Prix Campari qui récompensait un artiste. Alors que certains envoyaient leurs choix par procuration, lui se délectait d’étudier les dossiers de près, avec sérieux, de peser le pour et le contre et de défendre son choix tel qu’il est. C’est un véritable intérêt. Pas de l’opportunisme. Quelque chose de rare donc.
Et d’ailleurs, il m’a appris hier qu’il faisait désormais partie des artistes de « *La Bank* ». C’est top ! Si j’avais eu une galerie, j’aurais fait comme Céline et Marie-Céline, nos deux shérifs de l’art en talons aiguille : je l’aurais invité à rejoindre *La Bank* !

En tout cas, c’est très bizarre cet exercice consistant à filmer alors que vous voulez d’abord vivre le moment et ensuite, accessoirement, vous en souvenir comme si c’était hier. Finalement, dans cette histoire, il est impossible de ne pas se sentir comme un touriste japonais au bout d’un moment.
On adore mater les images après. Mais pendant, on a aussi envie de les vivre, et les vivre à travers un écran, un objectif, un viseur… c’est les vivre à travers un filtre. Ce n’est donc pas être tout-à-fait dans le réel… ni tout-à-fait dans le virtuel d’ailleurs. C’est vouloir fixer des images pour plus tard, des souvenirs, mais ce n’est pas toujours les vivre à 100%. Du moins, les vivre derrière une caméra change le point de vue sur les choses, change aussi le rapport aux gens et aux choses.

Exactement comme dans la real TV.
Sans parler du fait que le réel dépasse constamment la fiction. Le réel est vraiment plus intéressant que la fiction.
C’est une interaction, un truc qui brouille les questions spatio-temporelles, et qui est aussi capable de créer de belles situations.

Quitte à coller les gens que j’aime, j’ai suivi Bruno Peinado à la trace dans la cafète pas VIP du Grand Palais. C’était des retrouvailles, comme avec Saad la veille. Je ne vais pas tous les jours à Berlin, mais je vais encore moins à Douarnenez, cette ville Bretonne où Bruno s’est retiré avec sa moitié, Virginie Barré, et leurs deux filles. Du coup, une coupe dans une main et un balai dans l’autre, il m’a fait un ballet rien que pour la caméra. C’était extra !
Bref, au cours de la soirée, je me suis très vite prise au jeu de la caméra, j’ai surmonté cette histoire de filtre, d’intime… etc, et j’en redemande en fait ! Ça met l’adrénaline en feu !

Pour finir, j’étais tellement explosée de fatigue, qu’on a fait un dîner technique entre collègues de la chaîne au Palais de Tok… et même si Philippe Valentin fêtait son anniv en direct, j’avais plus la force de faire la fête ! Juste la force de lui faire une bise avant de filer et rêver me jeter dans mon lit toute habillée… ou alors faire un saut au Montana ! Mais privée de mon vélo, il me manquait un attribut essentiel : l’autonomie. J’ai juste chevauché la moto de Marcus pour passer une nouvelle nuit riche en rêves et en couleurs, dans le Marais, en costume de marin… ou presque!

dimanche 8 novembre 2009

Episode 73 bis

XXXXXXX

Mercredi 21 octobre (bis)

Hier, au petit matin, j’ai eu des envies années 20-30 avant de sortir de chez moi. C’était le moment de porter ma marinière avec sa large collerette carrée, presque une capeline, et une robe de dentelle violette.
Je ne me doutais pas encore que j’allais devenir « matelot », « matelotte », « marin », « marine », « gars de la marine »… ma marinière a beaucoup plu et surtout, elle m’a permis de déclarer que j’essayais effectivement de surnager dans l’océan artistique.
Vu tous les requins qui baignent dans le même liquide que moi, délicat poisson-chat, je commence à me demander si je ne suis pas en train de muter. Je suis dotée d’une paire d’ailes -ou d’ailerons- qui me permet de papillonner.
Mais surtout, je ne pensais pas que j’allais porter les mêmes fringues pour le vernissage d’hier, à la Cour Carrée du Louvre… et le vernissage d’aujourd’hui, au Grand Palais. Impossible de rentrer chez moi, dans ma forêt chérie, entre hier et aujourd’hui… et ce soir, rejoindre mon home sweet home ? Je ne garantis rien !

Etendue dans le VIP lounge du Grand Palais, caméra au poing -une HD qui tient dans la main- j’essaie d’ailleurs de me rappeler tout ce que j’ai fait depuis hier. Cette caméra est devenue une extension de ma main.
La main droite, celle qui écrit, s’est mise il y a quelques jours à pointer sur des séquences réelles de ma vie et à les enregistrer. C’est un exercice marrant. Par contre, ma main qui écrit est toujours en mouvement et a naturellement tendance à bouger… un peu trop pour la caméra. Du coup, dans un premier temps, les spectateurs de mes images auront le mal de mer… ce qui donne une légitimité supplémentaire à ma marinière.

Hier, j’ai fait mes premiers pas dans la vidéo in vivo au petit matin dans un hôtel du Trocadéro, « La Réserve », où j’étais conviée à un « petit déjeuner japonais » autour d’une expo. On devait venir me chercher en Motocab mais le conducteur en question a eu un accident. Rien ne vaut le vélo !
Est-ce le retour de la grande mode des expositions en appartement, de l’art in-situ qui pousse tranquillement dans nos habitats et nos chambres d’hôtel. Peut-être bien. Enfin, c’est aussi la mode des hôtels qui se mettent à l’art contemporain, et c’est vraiment pas du luxe… il était temps. Enfin, là, c’est la troisième édition de « Chambres à part », et on passe d’une pièce à l’autre. Je suis en compagnie de mon pote Nicolas Ledoux qui a participé à l’exposition. Quand il ne fait pas travailler la machine à faux-cartons d’invitation, il fait des dessins plein d’humour qui détournent le milieu de l’art contemporain dans lequel il baigne lui-même. Et sinon, je retrouve une série d’artistes que j’aime tout particulièrement comme Yi Zhou, Dominique Blais, Jeppe Hein, Iris Van Dongen, Terence Koh, Aaron Young… et beaucoup d’autres.

Mais bon, c’est la FIAC qui occupe tous nos esprits, on passe par les Tuileries pour vite se rendre à la Cour Carrée… et on peut admirer au passage les sculptures qui ne s’animent pas sur notre passage.
A part peut-être le cœur géant surmonté d’un perroquet de Jim Dine ou les personnages informes d’Ugo Rondinone à côté desquels tous les touristes posent. Ils ont ce côté ouvert à tous, sympathiques, un rien Walt Disney… le touriste se les approprie facilement pour une photo. Le bonhomme de neige de Pierre Ardouvin a lui aussi ce côté amical et spectral… à quelques jours d’Halloween, ces deux œuvres ont un côté amicalement grinçant qu’on apprécie quand les nuits s’allongent, que le froid s’installe peu à peu sur la ville…
Bon, et puis même si je n’ai jamais été fan de Barry Flanagan et de ses grands lièvres de bronze et de facture très classique, je ne peux m’empêcher de relever sa présence alle aussi fantomatique dans le Jardin des Tuileries à travers une œuvre dont je ne comprends que le titre - « Large Presidential Election »- mais pas vraiment les formes informes taillées dans le bronze… juste de quoi se rappeler qu’il nous a quitté cet été et que sa présence n’a rien à voir avec sa disparition…juste un clin d’œil.

Est-ce pour cela que les Giraud et Siboni ont eu envie de tout faire péter le soir-même et d’une seule fois ? Une détonation du tonnerre de brest pour un feu d’artifice du mardi soir, aussi grandiose que frustrant. Un bouquet, un son qui tue… et salut ! This is the show and the show is many things (comme le titre d’une expo qui a eu lieu à Gand il y a quelques temps)… and the show must go on !

Dans la soirée, pour le vernissage de la Cour Carrée, après avoir fait mollement le tour des stands et salué tout ce qui bouge avec l’impression de retrouver la « family » pour un grand mariage d’une semaine… après avoir pris plaisir à retrouver quelques cousins, tantes et oncles, neveux et nièces, éviter quelques grand-tantes encombrantes et à la langue bien pendue et grands-oncles libidineux, après avoir pris des photos souvenirs sous des œuvres délicates…

J’ai rencontré par exemple mon chèr Saad (Afif) que je n’avais pas vu depuis longtemps parce qu’il vit la plupart du temps à Berlin. Il continue à m’appeler « Anaïd D’amour », le plus beau surnom qu’on ait pu me donner depuis toujours. Il est l’un des quatre artistes sélectionnés pour le Prix Marcel Duchamp : une œuvre dévolue au son. « Afif » signifie « léger » en arabe et Saad a toujours l’air aussi léger qu’un pinson. Mais hier tout particulièrement, il avat l’air de planer au-dessus des nuages, débordant de bonheur… encore plus que d’habitude, comme s’il avait appris la plus belle nouvelle de tous les temps. On a siroté ensemble une coupe de champ’, aucune fuite, il n’a rien laissé échappé mais mon sixième sens m’a alerté. S’il s’agit de ce que je crois, je suis ravie pour lui.
Ensuite, j’ai retrouvé Marcus, Valéry et Delphine. On s’est installés au centre de la Cour Carrée. A la cafète et pendant que les chaises commençaient à se faire rare et l’air plus dense, la caméra a commencé à se réveiller doucement d’un doux et long rêve.
Là, à quelques centimètres de nous, elle s’est mise à observer un drôle de mec avec un chapeau et des yeux globuleux : notre Fabrice Bousteau national, le rédacteur en chef de Beaux-Arts Magazine. Enregistré.
Etrange ce sentiment d’être devenue une sorte de paparazzi de l’art depuis 24h…
C’était pour « FIAC ME, I’M FAMOUS », un programme Anaïdien sur-mesure pour la chaîne de Marcus Kreiss. « Souvenirs from Earth ».

Je suis -du verbe suivre- à pas de chats et j’enregistre l’image de mes VIP à moi, les gens que j’aime qui font que l’art est «so different so appealing » comme un collage de 56 de Richard Hamilton, l’inventeur du Pop Art Anglais. Les extra-terrestres du show-bizz ne sont évidemment pas exclus de mes enregistrements, du moment qu’ils s’intéressent à l’art. Mais je crois que dès maintenant, je vais changer mon fusil d’épaule. Je n’ai pas l’âme d’une paparazzi. Je vais prévenir les gens que je filme avant même de les filmer. Faire des sortes d’interviews, même si l’on sait que le son sera zappé. Et le son sera naturellement zappé car j’ai trouvé un truc : je passe mes films au ralenti… ce qui fait que le son comme l’image nous donne l’impression d’être dans un monde à part, en appesanteur. Comme un souvenir lointain, un « Souvenir from Earth » surtout !

Et c’est tout naturellement pour « Souvenirs from Earth »… une chaîne télé qui ne s’appelle pas TF1, France 1, France 2, W6, TNT, LCI, Itélé… etc, etc, c’est « Souvenirs ».
Est-ce qu’on n’a pas le droit de mettre un peu de poésie dans le titre d’une chaîne télé ? Celle-ci a été imaginée il y a de cela des années, par un artiste -Marcus Kreiss-, pour les artistes mais aussi les amateurs et autres passionnés d’art.

L’idée : pas de langage. Pas de barrage linguistique. On se contente du visuel, au plus fort du terme et du sonore, au sens le plus sensuel.
C’est l’image est les sensations qu’elle dégage, et non le langage, qui a le dessus sur « Souvenirs from Earth ». Et on contemple l’écran comme d’autres contempleraient un aquarium ou un bon feu. Avec la liberté de s’en détacher quelques instant pour mieux y revenir.
C’est la chaleur cathodique, tout simplement.

Y défilent de nombreuses vidéos d’art, mais aussi des clips arty toute la journée. C’est un peu le bébé de Marcus cette chaîne !
On en parlait déjà ensemble, il y a au moins 10 ou 15 ans, dans le Lubéron, avec Marcus, Olivier Reneau et Alain-Guillaume Poirier, alors que je passais mes vacances à Lourmarin.

Depuis, l’idée de Marcus s’est concrétisée. « Souvenirs » émet entre autres sur le canal 129 de la Free Box, et aussi sur SFR… mais bon, je ne suis pas sûre de tout comprendre sur le plan technique pour y arriver. Mais heureusement, il y a le site Internet qui fait relais.
Depuis quelques temps, la chaîne prend d’ailleurs enfin une réelle envergure. Elle avait trop d’avance sur son temps jusque-là. Marcus a été rejoint par Bernard et quelques autres personnages qui savent que l’utopie d’aujourd’hui est la réalité de demain et qui n’ont pas peur de parier sur des ovnis. Des intuitifs qui comprennent l’époque.

Et moi, ce soir, dans le VIP lounge du Grand Palais, alors que la nuit tombe sur la ville et que je suis dans cet écrin qui brille de mille feux, je sens que je ne vais pas pouvoir rentrer chez moi ce soir encore… et je sens que je vais encore me coltiner ma marinière bleue, ma robe de dentelle violette et tout le reste demain ! Rien à faire, il va falloir passer m’acheter un miminum de trucs dans une boutique… juste pour changer l’essentiel ! Je suis prise en otage… « Fiac me… I’m famous » !!!

jeudi 5 novembre 2009

Episode 73

Mercredi 21 octobre

J’ai à peine goûté les pignons qui baignaient dans mon jus de gingembre chaud ce matin que j’étais déjà entraînée par monts et par vaux sous la pluie et en ballerines -désormais défoncées- à travers Paris et sa FIAC.
Mais au moins, je retrouve mes chèrs pignons au dèj, dans ma salade, au « Café Blanc » de Courrèges.
J’avais envie de tester les lieux, entre deux rendez-vous pendant cette incroyable course-poursuite à travers les 100 et 1 évènements « on » et « off » de la Foire Internationale d’Art Contemporain de Paris.
Je n’ai pas pu m’empêcher d’entrer ici parce qu’on ne peut pas passer Rue François 1er l’estomac dans les talons et les talons dans la fashion sans lécher goulument les vitrines de Monsieur Courrèges… De là à me dire que j’allais passer de la lèche à la nutrition ! De là à me dire que j’allais trouver un coin pour y picorer une salade alors que je rêve d’un sac, d’une paire de shoes ou de bottes… il n’y avait pourtant qu’un pas.

Et côté couleurs, je me sens parfaitement intégrée.
J’ai un gilet d’un mauve très Courrèges : c'est-à-dire un mauve qui ne fait pas mémé ni pervenche mais un mauve dynamique qui vous projette directement dans un temps X, un rétrofutur ! Seul Courrèges peut jouer du mauve sans jamais tomber dans la guimauve !
Et bien que défoncées, mes Repetto argent à facettes holographiques s’intègrent elles aussi parfaitement ce cadre dans lequel je suis entrée.
Ici, les serveuses ne sont pas des serveuses mais des hôtesses rétrofuturistes tout de blanc vêtues - des créatures des années 70 projetées dans un futur rêvé dans les années 70- et elles sont censées onduler l’air impassible dans l’espace, vers les pauvres nous - des convives publiquement affamés- comme dans un film de Kubrick. T.shirt, baskets, jean’s… tout est blanc chez elles. Un blanc extra-terrestre.
Je suis assise sur l’un de ces sièges de skaï, face à une plaque de néon qui passe par toutes les couleurs de l’arc-en-ciel. Je me laisse absorber. Je crois que ça m’apaise, m’exalte, soulage ma fatigue. 2 jours que je n’ai pas avalé mes comprimés de ginseng. Mais sous le néon circulaire qui donne une atmosphère lunaire aux lieux, j’imagine que je ne crains rien. C’est comme une aura ou mieux, une auréole.
Installée à cette table ronde, une photo fashion des seventies à ma droite, je croque ma salade tout en me sentant étrangement prise au piège.
J’adore Courrèges et le style Courrèges est tout autour de moi, et pourtant, j’ai le sentiment d’être plongée dans la version cheap d’un des créateurs de mon top 10. Et je me vois ici, grignotant une salade top-basique à 10 euros, avec le sentiment que l’on m’a vendu un demi-rêve. La restauration ne suit pas le niveau. La bouffe n’est pas au niveau de la déco qui n’est pas au niveau du talent immense du créateur. Il y a comme un essoufflement. On prend un ticket pour le rêve et finalement, on nous réveille avant la fin du film.
Quelque chose est à revoir. Il faudrait que les salades aient un truc spécial, qu’on y glisse des graines de sésame qu’on ne trouvera nulle part ailleurs. Ou des algues. Ou qu’on y trouve tout un tas d’aliments blancs. Des laits végétaux de toutes sortes avec des sirops pastels intégrés, des yaourts de chèvre piqués de graines de pavot et de miel, des pétales de roses marinant dans la réglisse, de la coriandre, du gingembre-citron, infusé de jus de grenade… des salades vérolées de fruits rouges. Des algues régénérantes et de la verdure dans des packages blancs en résine… des fruits gorgés de vie et des plantes énergétiques. J’aurais voulu un fridge qui ne ressemble à aucun autre, que le contenu soit pur, et ait un goût rétrofuturiste, sain et bio.
Je sais, je rêve.
Mais ça me gène de déjeuner chez Coqueline et son mec et brusquement me dire que je suis peut-être dans la cafète du BHV.
A y réfléchir, ils auraient dû demander à Martine Aballéa de designer les aliments, d’inventer des menus monchromes ou arc-en-ciel et de leur trouver des noms qui font voyager.
On aurait sûrement eu droit à des eaux vertes, des potions violettes et des boissons rondes… Des fondants cosmiques, de la neige végétale, des « potages antiques » et autre confit végétal… je rêve de « Mousses au sirop », « Bouillon du lac », « Bonbons marines », Gâteau magnétique croustillant, Fruits nocturnes, Bouillie brillante, Sel de tempête… etc, etc, etc.
Bon, de toute façon, côté rêve, je vais me finir dans la boutique, juste à côté avant de reprendre mes aventures au cœur de la Fiac !

mercredi 28 octobre 2009

episode 72 bis

Samedi 17 octobre 2009 (bis)

Ne jamais aller chez Harrod’s ! Ça commence avec une copine qui voudrait juste le dernier Christmas’ teddy Bear, ça continue avec la copine chez qui on dîne et à qui on voudrait apporter un super dessert… puis on se perd et on se retrouve par hasard au cœur des dernières création de Belstaff et de Vivienne Westwood… un crochet par le rayon shoes et on se surprend à essayer juste pour voir des Marc Jacobs… finalment, on aterrit à la papeterie en voulant prendre le métro. Et en cherchant à s’y échapper, on soulage sa bourse avec des porte-clés en forme de cab ou de bobbys !
Au secours ! C’est pire que chez Liberty où on va pour le plaisir des yeux et où on sort calmement avec juste une boîte de chocolats… ceux de la Reine, évidemment !

Episode 72

Samedi 17 octobre 2009

Je me suis trompée de bar… faut croire !
J’étais dans les rues du « Swinging London » des seventies… et d’un coup, je me retrouve coincée dans un bar total look Rockabilly, qui ne donne même pas sur la rue. Tous stores fermés, il ne laisse pas passer un rai de lumière !
A l’américaine, en tout point. Pas ma vibration ! Trop tard pour prendre la sortie. Je suis trop crevée.

En tout cas, je me demande toujours quel genre de pays peut vendre des fringues si bon marché et une nourriture si chère. Idem pour les transports d’ailleurs ! Est-ce qu’ils n’aiment ni manger ni se déplacer ? Est-ce qu’ils font juste pousser des choses dans leur jardin ?
Peut-être que s’habiller est le cadet de leurs soucis. Ou bien le contraire ?
J’en sais rien mais ça ne les a jamais empêché d’avoir du style.

Et c’est comme ça qu’il y a moins d’une heure, j’étais face à un ensemble robe + veste de Louis Féraud : 2 pièces magnifiques ! Fin fifties.
J’ai regardé le prix juste pour me faire mal, et là… j’ai cru m’évanouir. Est-ce qu’il ne manquait pas un zéro ?
Non non non! 38 livres ou plutôt trente-huit livres sterling soit l’équivalent grotesque de soixante euros à peine. So cheap, me dis-je !
C’était pour moi et ça m’allait à ravir. Robe chasuble bicolore rose et bleue… mais loin d’être mièvre ! Une veste parfaitement coupée. Un travail de couture hors-pair. A l’extérieur comme à l’intérieur.
Je suis née dans les tissus, les boutons, les coupons multicolores, les fils et les bobines… on ne me la fait pas et une belle pièce est de plus en plus rare !

C’était fait pour moi sauf que je n’ai pas écouté le message.
C’était pour moi sauf que je me suis ruinée en vestes de l’armée britannique. J’ai déjà craqué sur un million de trucs juste avant et cramé pas mal d’euros! C’est un peu le même effet qu’après avoir respiré trop de parfum, on ne sent plus rien, ou on ne comprend plus rien.
J’ai craqué sur la énième veste militaire de ma collection et de ma vie… à se demander si je ne vais pas finir par mettre une armée sur pied juste pour les voir défiler et me rappeler ce que j’ai dans mes placards.
Est-ce que je m’achète une veste militaire tous les 6 mois ? Armée de l’air, de terre, mer… France, Grande Bretagne, Soviét… j’ai même une veste militaire de l’Armée Azérie… et Dieu sait qu’une Arménienne comme moi aura du mal à la porter ! C’est un Russe qui me l’a vendue… personne n’en serait étonné !! On ne refait pas l’Histoire.
Et voilà la pièce que je cherche depuis un moment : une véritable capeline de marine, une marinière amovible avec velcro à positionner sur sa vareuse selon ses humeurs.
J’ai aussi craqué sur… des lunettes qui font voir la vie en grand et en rose.
Deux pulls seconde peau ultra chauds qui ont des airs de panty.
Et puis une veste de velours rayure tennis. Genre : j’ai rétréci celle de mon boy friend. Ou bien du style: c’est celle de mon boy friend du lycée quand il rêvait de travailler à la City.

Sans parler d’hier où j’ai craqué sur un nouveau sac surmonté d’un Union Jack… à paillettes. C’était celui-là ou celui de TopShop en motif tartan. Qui sait si je ne retournerai pas le chercher avant mon départ ?

Et en ce moment, j’ai un problème : je m’achète un nouveau mini-sac par jour. Sauf que je ne me balade jamais qu’avec d’immenses sacs pouvant contenir mon MacBook, mes cahiers, mes stylos et mes bouquins ! A quand le caddie franchement ?

Quoiqu’il en soit, 2h à Portobello comme aujourd’hui et je me fais 30 looks sans hésiter. Un toutes les deux secondes. Le temps de cligner de l’œil.
Except… le problème de budget. Mais j’ai décidé de ne plus en avoir grand chose à cirer. Du moins pendant 5 jours au cœur de Londres.

Tout-à-l’heure, j’irai chez Harrod’s chercher un Christmas Teddy Bear pour l’offrir à Patricia. Et puis, je ferai tout pour ne pas me laisser piéger par le rayon papeterie.

Loin de la foule de Frieze, loin de l’art contemporain, immergée dans London, je n’ai aucun doute sur mon identité… je suis british. Le nez dans les pickles et les vieilles dentelles, j’ai parfois le melon. J’aime les parcs que l’on traverse en pleine ville avec l’impression d’être en forêt.
Il n’y a que les écureuils pour nous rappeler qu’on est en pleine ville tant ils sont snobs.

Dès ce matin, avec Laurence et son fils Archigan, on est allés de Kensington à Portobello… en passant par Holland Park.
Débat vivant avec les écureuils du quartier. Du live, cette fois.
J’ai chaque fois le sentiment en les voyant qu’ils viennent ponctuer les parcs qu’ils traversent. C’est comme des virgules qui traversent la verdure en ondulant.
J’ai regardé ce matin une de ces virgules droit dans les yeux pour essayer de le réduire à un point. Inutile d’espérer. La créature m’a gentiement défiée d’un regard qui signifiait : « no nuts, no doubt, you suck ! »
Et puisque c’était un fin gourmet, mon écureuil a fait volte-face et s’est cassé, la queue en panache… selon l’expression consacrée !
L’esthétique du rongeur… encore et encore. Ça continue !

On est passées avec Laurence devant d’incroyables résidences au cœur du triangle d’or. Des maisons victoriennes dignes d’un Agatha Christie : l’une d’entre elles avait même déjà accueilli une Miss Marple cinématographique. Quant à la maison voisine, c’était celle du producteur de James Bond.

D’ailleurs comment éviter le people à London… et surtout à Portobello ?
Les boutiques vintage de Portobello en regorgent et sur les talons de Laurence, on rencontre souvent des légendes sans que ça ne fasse la moindre vague.

Alors que l’on faisait une séance d’essayage de lunettes, on rencontre Ana Maria, une amie de Laurence. Et de quoi discutent donc ces deux Londoniennes d’élection ? D’une ancienne amie commune, bien sûr : Annie Lennox pour vous servir. Et la dernière fois que la capiteuse Ana Maria a vu Laurence, c’était pour la photographier, le ventre rond, à Portobello.

Bon, quant à moi, j’ai passé au moins trois quarts d’heure avec John.
Et si j’ai eu beaucoup de mal à quitter, ce n’est pas parce qu’il était le sosie Brit de Pierre Richard ou qu’il avait l’air d’un énième chanteur de rock mais parce qu’il vendait les plus belles vestes militaires de Portobello en french avec l’accent Brit le plus sexy et le plus châtié de tout Portobello.
Vestes à galons, à épaulettes, festons et passementeries… écussons… j’ai tout essayé… puis j’ai opté pour la plus simple, la moins colorée, la plus passe-partout, mais la plus stylée.

Et alors que je ressors avec l’impression de quitter un vrai pote qui m’a fait en plus une pure ristourne… je retrouve Laurence avec un beau gosse trois enseignes plus loin, dans une boutique à l’ancienne et pleine d’incroyables rouleaux de tissu.
Je discute avec lui de la photo qui est au mur et qui représente son clone à l’ouverture de la boutique : c’est tout simplement son père. On est dans l’entreprise familiale. Un splendide vieux beau. Je trouve ce quinqua ultra sympathique et rayonnant mais on n’a pas le temps de taper la converse… on doit y aller.
Et en sortant, Laurence m’apprend que je viens de parler à une légende vivante : j’étais en compagnie d’un des guitaristes de T.Rex !
No comment.

This is Portobello !
Pr contre, il y a toujours un revers à la médaille. Ça me fait toujours mal de me dire que ce quartier où j’ai vécu pendant 15 jours il y au moins 15 ans s’est transformé à ce point, jusqu’à se dénaturer, se caricaturer et se remplir d’un tas de gens qui parcourent les rues sur les traces d’une preuve filmique !

Et surtout, on ne peut plus causer tranquille !

On ne peut même plus insulter tranquillement et gentiement quelqu’un en français… sans que la personne ne se retourne pour vous dire que vous n’êtes pas sympa de la traiter de connasse alors qu’elle marche tranquillement dans le troupeau de français qui se baladent quotidiennement à Portobello ! En français dans le texte !
Bon, ça ne m’est pas arrivé… mais c’était à deux doigts et finalement, c’est arrivé à ma copine !
Et dans la file d’attente de la cash machine, idem : impossible de faire des confidences sur son lover du moment sans que le mec qui se trouve juste devant vous ne vous lance des regards complices… du style : je te comprends, les mecs sont devenus assez insupportables à Paris, c’est pourquoi je me suis exporté.

Portobello est devenu le Montmartre British. On est tout proche de la tarte postale avec les échoppes à souvenirs bidons. Impossible de s’y sentir dépaysé tant la première langue du quartier est celle du touriste Français.

Il ne manquerait plus qu’on y colle une Joconde… où que le Da Vinci Code passe quelque part par là pour que le tableau ne soit aussi complété par une armée de Japonais venus mitrailler la rue de photos ou qu’un car de Pékinois ne débarque démonter la ville pavé par pavé et la remonter en miniature à Pékin.

Quoiqu’en parlant de Joconde… j’ai croisé le regard de Sophie Calle ici-même en début d’après-midi. Etait-ce près des « Couilles du chien », la légendaire boutique de Portobello ou près d’un Salon de thé, aucune idée. Peut-être était-elle sur les traces de Jack l’Eventreur vue le regard enflammé qu’elle m’a lancé. On était si sidérées de se croiser d’un jour sur l’autre qu’on a préféré se défier du regard… alors qu’on s’adore. Enfin, autant que cette femme, artiste pourtant respectée et même vénérée pour son œuvre, puisse aimer une autre femme. Pourquoi jouer les vieilles acariâtres quand on a autant de talent ?

De toute façon, c’était une journée artistiquement off. Je la dois à ma fulgurante Laurence et son adorable Archigan.
Il me faut vite sortir de ce bar aux allures américaines pour vite les rejoindre. Et avant, je dois me rendre à Knightsbridge où m’attendent les chevaliers de Hyde park.

mercredi 21 octobre 2009

Episode 71 bis

Jeudi 15 octobre 2009 (suite)

(…)

Bon, bon… et sinon, c’est mon premier jour à Londres et c’est aussi le premier jour d’une sorte d’enfermement volontaire ou en tout cas d’isolement dans une boîte installée en plein dans le green de Regent’s Park.
Si on réfléchit, c’est tout de même aussi ça Frieze. Pas un night club mais un art club.

On est le 15 octobre… et c’est aussi la date choisie par Artus pour s’enfermer dans une boîte. Une vraie boîte en carton adaptée à sa taille. Je suis donc en connexion avec lui à travers un échange franco-britannique télépathique.

Tout comme moi, Artus est dans un temple de la consommation : le Citadium/Printemps, rue de Provence à Paris.
On n’y vend pas tout-à-fait le même genre de choses qu’à Frieze, mais bon… on y vend quand même des produits, on y fait des promos et des ristournes, on y a le sens du spectacle, il y a une machine à CB si jamais vous ne pouvez pas payer en cash. Et il y a aussi une cash machine.
Si on ne veut ou ne peut rien acheter, pas de problème, on peut aussi s’y rendre juste pour le plaisir des yeux et des animations. Se baigner dans l’atmosphère.
Frieze est une foire, avec tout ce que cela comporte de phénomènes de foires, de freaks… on peut y voir des hurluberlus qui ne trouvent rien d’autre à faire pour attirer le regard sur eux que de se déguiser, ils sont prête à tout pour qu’on les regarde et qu’ils se prennent un instant pour des œuvres d’art ou des sculptures vivantes. Prêts à se mettre n’importe quoi sur la tête ou sur la cul du moment qu’on se retourne sur eux. C’est parfois de l’ordre de la thérapie. Parfois c’est juste beau, juste, réussi… On y trouve des instants de grâce comme cet être totalement atemporel en costume de velours, qui posté sur un stand joue sa partition au violon. Totalement absorbé. Sourd et aveugle à ce qui l’entoure. Habité par sa propre musique. Impassible et anachronique. Plus qu’une image. Parfois, c’est une vraie parenthèse artistique… mais c’est rare. La plupart du temps ça reste des phénomènes de foire.

Alors que certains s’ingénient à infiltrer du quotidien dans l’art, Artus injecte de l’art dans une boutique, un grand magasin. Il nous demande presque de le retrouver si on l’ose.

Il passe deux semaines enfermé au Printemps.
Injoignable par tél, mail, mer, air… il a confié ses objets de communication à des proches censés communiquer entre eux, buzzer sur sa présence fantomatique errant dans un grand magasin labyrinthique 15 jours durant.
Du 15 au 30 octobre 2009. Au 104 rue de Provence, de 10 h à 20h du Lundi au samedi « à l’exception du Jeudi ou le magasin ferme à 21h, et du Dimanche ou je me baladerais dans Paris. » ajoute-t-il.
« J’arriverai vers 9h50 vêtu d’un costume blanc, au 104 rue de Provence et en repartirais vers 20h10. La boîte fait 0,90 x 0,90 x 1,90 m et est placée horizontalement non loin de la vitrine ou se trouve la peinture « Consumérisme ».
J’y amène tous les jours le journal « Le Monde », et je dors sur le matelas sur lequel dormais ma mère, avec une couette, deux oreillers, un réveil, des boules Quies, un réveil, une lumière, un stylo et un carnet de notes. Trois bouteilles d’eau, dont une vide. (…)»

La bouteille vide, c’est pour… uriner ?

En même temps, en relisant toutes les conditions de son incarcération volontaire, je me pose un tas de questions sur ces réelles motivations.

Il y a cette contradiction entre s’exhiber et se cacher, s’exhiber tout en se cachant, se cacher tout en s’exhibant. Artus est une rayonnante terre de contradictions de toute façon. Donc, il prend un rayon de lumière, un rayon du magasin, une tête de gondole tant qu’à faire, pour s’y cacher. Jouer entre présence et absence.

Je ne peux pas m’empêcher de me demander pourquoi un artiste, c'est-à-dire quelqu’un qui n’a volontairement pas d’horaires tant sa discipline personnelle dépend de ses désirs et de ses pulsions créatrices… comment un artiste décide-t-il subitement de s’imposer des horaires rigides et inflexibles. Presque des horaires de bureau. Etonnant pour un artiste secrètement réfugié dans un temple de la conso pour y créer.
Je sais que la création a besoin de cadre et de contraintes pour se dépasser, se transcender. Mais à ce point, respecter des horaires de fonctionnaire, ça me dépasse. C’est un luxe que je n’ai pas réussi à m’accorder trop longtemps.

Et je me dis que ça donne au Printemps -une bien belle saison d’ailleurs- des airs de résidence artistique masquée. Un lieu de méditation qui donnera lieu chaque soir à des heures de réflexion et d’écriture. De création. En pleine période de crise, c’est finalement un lieu comme un autre pour travailler et rêver, pour créer. Un bureau et un atelier du même coup dans un lieu anti-sacré.

Tout ça pour une « Installation-performance »… ce qui veut dire quelque chose qui fait d’Artus un hybride, à la fois sujet et objet. Une « sculpture vivante » ? Un Gilbert & George à lui tout seul ? Un « personnage à réactiver » ? Un personnage tout court.

Ce qui expliquerait qu’il soit en tenue de gala pour y aller. En même temps, il enfile son costume blanc comme d’autres enfileraient leur combinaison de travail.

Mais plus qu’un ouvrier de l’art, Artus évoque plutôt Beuys et son expérience avec le Coyote de 1974. Il s’agit d’un homme -Josef Beuys- qui s’enferme avec un coyote toute une journée durant, apprivoisant la bête sauvage, installant un système de respect mutuel plutôt qu’un rapport dominant-dominé. Mais quel est le rapport ici ? Qui est la bête sauvage ? Quel bête sauvage Artus tente-t-il de dompter ? Est-ce sa propre nature qu’il met ainsi au défi?

Et chaque jour, il se rend à sa résidence en costume blanc.
Pourquoi blanc ?
J’ai eu comme l’impression qu’il gardait de jour en jour 15 jours durant le même « bleu de travail » qui est en fait blanc, comme pour mesurer son non-labeur à la hauteur de sa non-activité. Ou bien est-ce une réelle activité immobile ?
Avant d’aller chaque soir s’effondrer de fatigue dans son atelier d’écriture et de travail perso dans le Marais. Sur le matelas de sa mère disparue il y a peu.
Mais pourquoi le matelas de sa mère. Pourquoi le préciser dans le communiqué ? Pourquoi rejouer cette séquence ? Quel était le rapport avec sa mère exactement ? Elle est très présente dans son œuvre. Au centre de son œuvre, de plus en plus. D’autant plus depuis sa disparition je crois. Est-ce une manière de faire son deuil ? De la faire revivre ?
D’ailleurs, ça a sûrement un rapport ave « L’Art Posthume », le groupe artistique dont Artus est le confondateur avec deux autres artistes dont un photographe, Daniele Tedeschi.

Le trio a même signé un manifeste dont je n’ai pas forcément encore compris toutes les subtilités. J’attends qu’il m’explique une fois de retour à Paris.
Mais j’imagine que sa mère est l’inspiratrice de ce « mouvement » artistique s’il en est. Et surtout je pense que sa mère était une « artiste sans œuvre »… dont l’unique création était une œuvre d’Artus !!
Ça paraît de plus en plus clair. Psychanalytiquement parlant en tout cas.

En attendant, je quitte ma boîte de Regent’s Park pour prendre l’air d’une autre boîte : un tour chez TopShop à Bond Street me changerait-il les idées ?

Mais non mais non… j’ai encore à faire !

J’entraîne Antoine sur Bond Street, Oxford Street… onward, on a l’expo Blair Thurman à aller voir chez Alexia Goethe. On en profitera pour faire un saut chez Sadie Coles qui présente Sarah Lucas. Et puis, dans la vitrine de je-ne-sais-plus-qui, on pourra admirer une vitrine de Baldessari qui a son expo perso à la Tate en ce moment.
Ensuite, Antoine m’emmène dans une ambiance frenchy : Sophie Calle à la White Chapel. Est-ce que ce sera pour elle une rétrospective en forme de lifting ?

Episode 71

Jeudi 15 octobre 2009

C1 : c’est là que je me trouve ici et maintenant et où l’on peut me rejoindre.
Je suis assise à une de ces tables rondes, en hauteur, dans une cafète digne d’une sitcom hyperstylée. Ou d’une séquence dessinée par Jean-Philippe Delhomme. Dans une foire hyperfashion, dans une ville over glam, sur un territoire so Brit’ !

Je prends uns café with « this water made from fruit and clouds».
Ingredients : lemons, limes, et spring water. J’en veux encore et encore. De la poésie en bouteille. Des nuages à avaler. It’s so refreshing. Je suis au cœur de Frieze et mon cœur balance : manger des sashimis avec ma spring water, me perdre dans la foire ou me perdre tout court en envoyant un MMS galant. Les 2. Rayez la mention inutile. Il y a une image ici qui rend un bel hommage à quelqu’un qui spontanément me plait. Un néon qui dit en passant par toutes les couleurs de l’arc-en-ciel, en écritures stylées et penchées, en majuscules, et dans la langue des lovers « I LOVE U ». Exactement ce genre de mots désuets qui fleurent bon l’aventure et vont bien avec mon Londres perso.

Je me suis perdue dans la foire comme je me perds dans toutes les foires. Car je les déteste toutes sans exception. Ce sont les entrailles du marché de l’art. les tripes de l’art à découvert.
Je pense souvent à ce que m’a confié Kamel Mennour un jour lorsqu’un de ses artistes lui parlait de l’accompagner sur le stand d’une foire. Pour lui, c’était la pire chose à faire pour un artiste et il a tout fait pour l’en dissuader, jusqu’à employer l’image qui me semble la plus juste à ce jour : « C’est comme voir ses parents faire l’amour ». Une sensation étrangement dérangeante. Mais tellement vraie.
Et chaque fois que j’entre dans une foire, sans pour autant être une artiste qui voit son marchand vendre ses œuvres, je me sens mal. Overdose d’art. Vers où aller, vers quoi tendre dans cet hyper hypermarché de l’art. Le pire, dans le genre, c’est Bâle.
Et pourtant, je suis toujours heureuse d’être à Frieze car jamais je ne m’oblige à rien ici.
Du coup, j’y perçois un million de sensations, avec l’impression en plus d’avoir le ciel à boire… et qu’il a un gôut de citron.
Ça me stimule et ça m’inspire. Je fais des alliances de mots improbables, de nouvelles images viennent s’ajouter aux œuvres que je croise sur mon chemin… ça se décuple, ça produit des tas de petites bulles effervescentes dans mon esprit, ça se répercute sur mon humeur et mes écrits.
Bon, je suis donc dans un de ces moments de pure exaltation. Je me mets les Pixies pendant 2,30 mn: « La la love you ».

Et en repensant à mon tour Friezien, c’est une esthétique du rongeur qui vient s’imposer à moi. Il y a cette pièce faite d’une invasion de souris informatique que j’avais vu dans une foire d’art moscovite il y a un an. Impossible de me rappeler le nom de l’artiste.

Ici, si j’étais une collectionneuse réelle et non juste une esthète visuelle, je me serai achetée une œuvre qui me ramène à mes sous-bois : un incroyable écureuil pris en plein vol. En suspension, juste avant de se poser. Pris en plein saut, quelques secondes avant d’aterrir sur son socle muséal blanc. Quelques secondes avant de devenir une œuvre d’art ? Une œuvre en devenir ? C’est Agnieszka Kurant qui a immortalisé ce bel animal empaillé, la queue en panache et l’œil vif, en plein mouvement.

Ensuite, j’ai rencontré un rat blanc, les yeux tout rouge, installé sur ses pattes arrière. Médusé par une œuvre d’art qui le dépasse, ou qui sans doute l’interpelle intellectuellement. C’est une sorte d’énorme excroissance blanche. Probablement en résine. C’est surtout une présence écrasante pour ce rat qui bloque dessus ! une belle métaphore de ce que pourrait être l’art.
Evidemment, on doit cette pièce à Elmgreen & Dragset, l’un des duos les plus vifs d’esprit du moment. Toujours plein d’humour. Un brin pince-sans-rire.

Du coup, Lara Pan, la jeune galeriste New Yorkaise que je croise tout près de l’écureuil d’Agnieszka réagit à mon « esthétique du rongeur » en évoquant sa prochaine expo « Pandora’s box… ».
Elle évoque l’installation de Roberts Lazzarini dont l’intention pure et simple est de reconstituer un bout d’appartement avec cuisine et l’envahir d’un tas de petites créatures affamées : une colonie de rats d’égouts grouillant dans l’espace… bouhhh, une belle métaphore bien réaliste pour évoquer notre charmante société ! A faire froid dans le dos.
Dans la même expo, la même Agnieszka, installe, elle, un appareil à produire de la neige noire. A suivre, à suivre.

Pour le côté old school, victorien, désuet… on a Markus Schinwald et ses pieds de meubles qui réinventent le Kama Sutra mobilier. Je vois des boîtes à chapeau habités (Vasco Araujo). Des casques de moto (Maix Mayer). Des échiquiers. Des pions qui rongent les murs. Un pion géant de Julian Goethe. Goethe l’écrivain et comme… Alexia Goethe, la galerie de Blair Thurman qui l’expose en ce moment-même à Dover Street et que je compte visiter tout-à-l’heure sur les conseils de Frank Elbaz. Et lui, sur un stand très sobre, il présente le très mystique et cabbalistique Wallace Berman. Je vois aussi de l’abstraction. Des trucs à facettes, des miroirs pas disco. Et aussi des dessins magnifiques de mon chouchou du moment, Marcel Dzama que l’on peut reconnaître à la couleur de l’encre qu’il emploie : une sorte de marron fait à base de houblon !

Et puis, comme on est à London, je jurerai avoir croisé Charlotte Rampling le long des allées de Frieze… et je jurerai avoir vu son tableau tout de suite après. Est-elle entré dans la toile? En est-elle sortie ? Aucune idée. Mais sa froideur reste suspendue dans l’atmosphère.

A part ça, difficile de tenir longtemps debout. Je suis à côté de mes pompes aujourd’hui.

Je ne tiens pas l’alcool. Normal, je ne bois quasi jamais… mais pour couronner le tout, avant-hier, je n’ai dormi qu’une heure. J’étais attendue pour une conférence aux Beaux-Arts d’Angers dans la matinée, j’ai couru à l’aube de la gare de Taverny à la Gare du Nord, de la Gare du Nord à la Gare Montparnasse… pris un train pour Angers, raconté ma vie de critique d’art un peu jet-set et plutôt précaire à des artistes en herbe en première année des Beaux-Arts. Une belle pureté et une écoute, une soif de connaissances qui me donneraient presque envie de redonner des cours !
Bilan de mon parcours après 15 années d’immersion totale dans l’océan de l’art. Une conférence stimulante, effervescente, pleine de belles énergies. Discussions autour de la position de l’artiste. L’art est-il ou non sacré. Le street Art est-il ou non de l’art ? Sont-ils ou non artistes ? Avec un A majuscule ou minuscule… ou bien sans A ? On aborde les paillettes de l’art alors que l’expo Malaval a lieu à deux pas.

12h05, on se quitte tranquillement. J’ai à peine conscience d’avoir un train à attraper dans la demi-heure. Je suis juste exaltée. 12h38, je brave l’impossible, j’atrappe le train qui me ramène à Montparnasse et qui m’évitera de louper mon Eurostar vers 17h30, Gare du Nord.
Je sashimiserai le débat une fois à Paris si j’arrive à accomplir tout ça.

Et finalement, tout a collé.
Et j’ai aterri au Méridien à Picadilly après cette incroyable journée où j’ai eu le sentiment de me mettre au défi et de me dépasser comme j’aime. J’ai failli m’endormir dans mon bain.
Seulement, même si je retrouve Jérôme Sans en pleine forme derrière les platines et Nicolas Kenedi d’humeur malicieuse… la fête frenchy du Méridien me monte à la tête : trop de bulles dans le champagne. Il n’empêche que je me déhanche avec plaisir sur le dancefloor. Où sont passés Alexis Vaillant, Alexandre Polazzon et Pierre Bal Blanc ? Il ne reste que Johann Koenig sur ce dancefloor, avec ses lunettes épaisses comme des loupes, il a des airs attachants de taupe. Il n’y voit pas grand chose. Etrange pour un galeriste. Il n’y voit goutte, c’est donc le sensoriel qui l’emporte chez lui. Il est donc plutôt chaud sur la piste et même franchement incandescent avec les minettes qui l’entourent. Mais pas question de m’évanouir dans ses bras… je préfère mon immense lit, chambre 444, que je rejoins je ne sais comment et dans lequel m’attend Morphée. Je le rejoins toute habillée, tant qu’à faire. Tant pis pour le DJ bombesque qui a suivi Jérôme aux platines. Son set était plutôt minable en fait… mais ça m’a permis d’échanger quelques mots, il avait l’air tellement désolé.

Journée hallucinante…
Du coup, j’ai payé tout ça très chèr ce matin… complètement à l’ouest. Au lieu d’aller à Frieze à Regent Park, je suis allée dans l’Est, dans les bureaux de Frieze, le mag. Totalement allumée ! Une envie de visiter la ville en cab, faut croire. An « expensive mistake ». Une spécialité Anaïdienne. Après avoir fait des confusions dans sa jeunesse entre Charles de gaulle Etoile et Roissy Charles de Gaulle, toujours un peu groggy, elle confond Dover Street et Regent Park où elle est allée plus de 5 fois dans sa vie ! C’est le prix à payer après une journée de dingues. Dans le cab de retour, le taximan et moi on admire les ambulances et leur sirène. On se marre parce que je rêve d’en attraper une au vol et qu’il considère que j’en aurais bien besoin, dans tous les sens du terme !

De toute façon, je suis en retard à mon RDV, et on met une demi-heure de plus à se retrouver Stephany, l’attachée de presse du Méridien, et moi. Bien allumées toutes les 2. Y avait un truc dans le Champagne hier à tous les coups. Une hormone de la désorientation. On ne se retrouve pas alors qu’on est postées au même endroit et je finis par me passer de son pass pour entrer avec Lara Pan.
Interview avec Eva Ziegler qui s’occupe de l’image du Méridien de par le monde. C’est elle qui a pensé à Jérôme Sans pour ouvrir ses hôtels à la culture. 3 mots pour résumer les choses : Chic, Culture, Discovering.
Tous les hôtels ont leur personnalité propre avec un ou plusieurs artistes qui y créent des œuvres mais aussi réalisent le motif de la clé. Ici, c’est Sam Samore qui s’est occupé des pass pour les chambres. Une bouche, un œil, un nez… c’est une allusion au 5 sens. Et ce n’est pas tout. Il y a de l’art dans tout l’hôtel.
Je suis invitée pour « Unlock Art » qui met en relation les hôtels de chaque ville avec une foire d’art contemporain et surtout un lieu pointu de l’art. Un lieu perméable à toutes formes d’art, avec une vocation didactique. Là, il s’agit de permettre aux pensionnaires du Méridien Picadilly de pouvoir se rendre gratuitement à la Tate Modern et la Tate Britain. J’irais donc voir « Pop Life » et surtout l’exposition perso de Baldessari par ce biais.

Des Prix Méridien sont aussi décernés à des artistes de Frieze. L’implication culturelle est donc importante du côté du Méridien et sur les conseils de Jérôme Sans. C’est un pont entre l’art et le grand public. Et c’est à travers le monde. Je me rappelle qu’à Miami, Sam Samore avait aussi conçu un roman à lire dans son lit avec vue sur l’immensité de l’océan.
Je crois que je vais écrire davantage sur les hôtels… surtout ceux de Picadilly! Tout n’a pas été dit ici. J’ai pas assez dormi.

mardi 20 octobre 2009

Episode 70

Samedi 10 octobre 2009



De gare en gare, de train en train, toujours mes sacs et mon ordi à portée de main… je suis en transit. En ce moment, j’habite là où je me trouve.
J’habite surtout dans mon ordinateur, dans mon journal et dans mes écrits. Quand le réel m’ennuie, j’habite dans le vert prairie de cette encre ou encore ce violet… j’habite de l’autre côté de l’écran, quelque part dans une architecture dont je monte et démonte moi-même les murs. De jour en jour.
En parlant d’écran, mon ordi et mon téléphone sont chacun épuisés.
Du coup, je me mets au papier et à l’encre vert pomme. J’écris comme je respire en ce moment. J’ai envie de faire 1000 choses à la fois mais l’écriture prend le dessus à chaque fois, elle me ronge, me consume et me constitue. Je commence à me demander si ce n’est pas une maladie, si ce n’est pas dangereux pour ma santé.
J’aligne les mots et ils ont quelque chose de plus en plus liquide à mes yeux. Ils filent comme une eau de source, m’échappent même parfois. C’est une eau vive, fluide, pétillante. Et ça court en moi. Si je devais me définir, je dirai que je suis une eau pétillante avec de petites bulles très vives, le tout ponctué d’un fond de citron pour la touche acidulée. Et j’espère être rafraîchissante.

Mais il s’en faudrait de peu pour que je me mette à geler ici, tout près des montagnes.
Je suis à Grenoble. Mais je suis dans le mouvement, ce qui me permet de maintenir les températures.
Sud-Nord-Est-Ouest… Hier, j’étais à Bordeaux pour Evento. J’adore le TGV. Je voudrais qu’il ne s’arrête jamais. Je passe d’un événement l’autre.
La bande d’Olivier Mosset est réunie dans une expo du Magasin qui sent la gazoline comme on aime : « Portrait de l’artiste en motocycliste » regroupe une cinquantaine d’artistes. Ils font le portrait de cet artiste sans doute recherché par toutes les polices dans les sixties. Pourquoi : parce qu’à trop chevaucher des Harley et des Vincent dans les 60’s, il a fini par être le meneur des grosses cylindrées du tout-Paris.
J’ai rien à me mettre. Hors de question que je mette mes Carolina et mon perf. J’ai pas envie d’avoir l’air de failloter avec mon look de motarde bien étudiée. je suis obligée de me transformer en jeune fille de bonne famille. Les bad boys préfèrent les girls grils girls. Je ne résiste pas à la touche wild : je craque sur un bourse en daim clouté couleur sable Arizonesque… De quoi me mettre dans l’ambiance avant de rejoindre la bande de notre easy rider de l’art favori.
Pas vraiment un bad boy, ni vraiment un angel. C’est surtout un ex Hell’s, exilé à Tucson en Arizona. Camouflé derrière sa barbe de druide, il pourrait aussi se faire passer pour le chanteur ou le guitariste de ZZ Top.
Pour l’heure, je suis dans mon bain. On m’a collé une chambre « handicapée » à l’hôtel et ça ne m’est pas du tout adapté. Je repense à ce couple que j’ai croisé dans les couloirs de l’hôtel, mon MacBook dans les bras à la recherche d’une connexion. J’ai failli douter de l’identité du mec, on aurait dit Carl Barat, mais j’imagine que le guitarriste des Libertines n’aurait jamais choisi cet hôtel. Carl Barat en plus figé, plus conventionnel… plus arty en somme. Elle et lui, ensemble, ils avaient l’air de sortir d’un vernissage… ou d’y aller. Et je pouvais voir en eux les yeux fermés. Un joli cliché.
Elle : une jolie minette. Brunette à frange. 27 ans à tout casser. Jolie frimousse, bouche pulpeuse, maquillage discret. Moulée dans une robe courbe, légèrement assymétrique. Perchée sur 12 cm de talon pour ralentir le pas entre l’hôtel et le Magasin. Pas du genre à la ramener trop dans une conversation.
Lui : proche de la quarantaine. Regard translucide. Joli mais faussement sûr de lui. Peu habité. Pas grand. Pas gros. Pas laid mais pas beau beau beau. Presque un jeune homme de bonne famille mais avec ce côté Hugh Grant qui agace dans le mauvais sens du terme. Du genre à peut-être faire des coups malins sous ses airs d’ange. Le genre à toujours respecter les poids et les mesures.
Elle et lui. Deux. Un artiste qui a l’air de sortir accompagné de son accessoire vivant. Avec l’air de proclamer à tous les autres mâles de l’assemblée: « Regardez ce que je suis capable de ramener ! » Elle qui se sent valorisée par son statut à lui, alors que lui se sent valorisé par sa fraîcheur et sa beauté à elle.
Pourquoi ai-je eu le sentiment de les connaître à ce point. Me suis-je trompée ?

Bon, il faut que je me magne… il s’agit de mettre le turbo. Lait pour le corps. Mes ballerines, mon sac clouté, mon leggings violet. Une chanson m’obsède : « Comme un garçon, j’ai les cheveux longs… Comme un garçon je porte un blouson, un médaillon, un gros ceinturon… Comme un garçon.
Comme un garçon, moi je suis têtue et bien souvent moi je distribue des corrections comme un garçon faut faire attention…
Comme un garçon, moi j’ai ma moto, Comme un garçon je fais du rodéo, c’est la terreur à 200 à l’heure, comme un garçon !
Comme un garçon, je n’ai peur de rien, Comme un garçon, moi j’ai des copains et c’est moi qui commande… Comme un garçon. Pourtant je ne suis qu’une fille… et gnagna gnagnagna gnagna… »


Dimanche 11 octobre


« Art is a word » nous rappelle Ben d’entrée. J’aurais jamais imaginé la présence de celui-là mais comme à chaque fois, quand il s’agit d’asséner une vérité, il est là, de toute évidence et c’est bien lancé.
Et non, Ben ne dit pas que des conneries, il n’est pas le plus autocentré de tous les artistes autocentrés et il n’est pas seulement le mec qui écrit des trucs partout sur les cahiers des Monoprix et les bérets… Au Magasin, un tableau de Ben nous rappelle que l’artiste est encore présent dans les temples de l’art et pas seulement ceux de la conso… même si ce centre d’art-là s’appelle « Le Magasin » !

Une affiche de Stella, un « Once there was… » de Louise Lawler. Et puis des drapeaux : ceux de Rockenschaub en couleurs fluo. Ou un American Flag qui ne parvient jamais à lever ses couleurs. Dressé sur son pic, il est à peine réanimé par un ventilo fatigué.
La bannière de Raymond Hains, est en photo, mais bien ventilé: des cercles blancs sur fond rouge rappellent le motif de prédilection d’OM, Olivier Mosset, du temps où il faisait partie de BMPT avec Buren, Parmentier et Toroni. Autre cercle noir, celui du circuit plus que circulaire, un véritable circuit pour momes, de Blair Thurman : l’artiste que je veux absolument rencontrer.
Et puis des cibles, des cercles concentriques, des genres de donuts de toutes sortes, de tous diamètres et de tous calibres. Ceux de Neil Campbell, en wall draw, dans un coin de salle nous font presque loucher, noir sur blanc. Le pneu au sol d’Allen Kaprow.
Hommage au monochrome avec des Steven Parrino très rock et enervés. Des œuvres historiques : un Klein, une « merde d’artiste » de Manzoni, un « Puppy » de Jeff Koons, un mini Carl André qui me ferait presque penser à un Space Invaders repeint en blanc… et même des gravures très amusantes et lègèrement mysogines -carrément même- du 18è !

Et puis un coin Suisse paisible et chaleureux, à la suisse, avec une install d’un galeriste, Gavin Brown, composée d’un confortable fauteuil entouré de romans de gare. On voudrait juste avoir tout ce temps à tuer pour s’y jeter ou de se mettre à plat ventre pour bouquiner sur le tapis étoile de ma copine Elena Montesinos.

Un pas de plus et nous voilà dans la véritable salle des portraits, dans le genre figuratif et même réaliste cette fois: OM sous toutes ses coutures, à tous les âges et tous les temps, imberbe ou velu… et en install avec des « shoppings bags » réunis sous le nom d’un parfum, « Egoïste », par Sylvie Fleury.
Une bien sûr, une salle « Abstraction Géométrique » Néo-Géo à la Suisse… Armleder & co. Dans « la rue », le grand hall du Magasin, sous la verrière, c’est le festival des wall draw avec les monochromes aux formats écrasants de Christian Robert-Tissot d’un côté, et de l’autre le wall draw très seventies et très réussi de Lang & Bauman.
Impossible de résumer cette expo dans laquelle on pourrait passer des heures… avant de finir à la cafète en très bonne compagnie : une Harley côtoie une véritable Vincent des sixties, la moto de Steve Mc Queen dans la « La Grande Evasion» tout simplement. Collection particulière de l’artiste, je suppose. Sur les murs des photos de l’artiste et d’Alain Dister en noir et blanc nous rappellent que l’art peut commencer dans un garage.

Quant à mon petit couple d’hier… J’étais sûre que je les retrouverai « en Magasin » une heure plus tard pour vérifier tous mes pronostics. Et ce fut le cas.
L’artiste se tenait près de son œuvre en cette fin de vernissage. Il parlait art à son entourage. Elle souriait.
C’était John Tremblay, un peintre dont on a pas mal parlé dans les années 90 et qui crée des tableaux avec des motifs ovoïdes. Comme des gestations multiples et multicolores.

On a fini à « La Madelon » avec toute la troupe des amoureux de l’art helvétiques et leurs sympathisants. Dispersés à différentes tables.
En compagnie de la plus Wild de mes amies Suisses, Elena Montesinos. Ça me donnerait presque des envies de prendre un aller direct pour Genève. J’y entraînerai aussi Jérôme que j’ai croisé plusieurs fois à Grenoble avant de faire réellement sa connaissance hier soir. Un artiste Grenoblois à la fois lunaire et réaliste. Un directeur de label. Un mélomane mystique qui écrit en métaphores et parle comme il écrit. Une sorte de poète déguisé en cheminot ou en majordome, ça dépend des jours apparemment !

lundi 19 octobre 2009

Episode 69: quand le sang bleu me met d'humeur massacrante

Vendredi 02 octobre 2009

Est-ce que je garde mes ballerines ? Est-ce que j’opte pour des bottes, une bonne paire de chaussettes et des leggings bien chauds ?
Froid de canard dans Paris.

Je fonce au Marly retrouver Jennifer Flay pour une interview FIAC. On se retrouve souvent dans ces lieux en octobre elle et moi, au moment où les températures baissent. Généralement en matinée, parfois avec Martin et toujours avec mon Ipod et son micro intégré.

La Fiac 2009 ? Elle est évidemment mieux que la 2008… et le pire, c’est que ce n’est pas une blague. Depuis que la pétulante Jennifer y a mis son grain de sel Néo-Zélandais, la Fiac a réussi son internationalisation. Et quand Martin est arrivé, c’est devenu un duo chic et choc, du glam et de l’intelligence à revendre de part et d’autre.

Tendance 2009 : le retour au Minimal répéré sur les deux Fiac précédentes s’accentue. L’anti-bling l’emporte… ouf !
Moins de spectaculaire, plus de sens, moins de gadget et de paillettes. Plus de planches de bois brut posées contre le mur ? Plus de clous qui pointent à même le mur ? Encore plus de dessins et de peinture aussi, c’est sûr.
Mais on utilisera sans doute davantage d’encre de Chine que de jus de caviar !
Heureusement ! C’est agréable de sentir que, malgré tout, la crise efface ou atténue souvent le mauvais goût ! C’est comme un garde-fou.
Mais j’avoue, le focus sur Berlin ne me rassure pas tant que ça.
Sauf que cela annonce aussi la présence d’artistes que j’aime comme Marcel Dzama.
Un certain sens du théâtre, de la théâtralité, un côté années 30 peut-être. Et puis des peaux de bêtes, des animaux empaillés verseront dans le retour à la nature j’imagine.
Pour ce qui est de la nouveauté, on aura surtout une partie « Art Moderne »… et ça, on a beau nous dire que la crise est peut-être déjà résorbée en Europe, je n’y crois qu’à moitié. Les valeurs sûres sortent d’autant plus des placards : les Picasso, les Mondrian et les Brancusi, les Bacon et les Leger vont venir respirer l’air de la FIAC cette année.
Autre visage de la crise : les stands se partagent entre galeries qui ont des artistes communs.
Il reste les performances, pour le côté festif.
Et en premier lieu, le feu d’artifice de Giraud et Siboni qui méritera tous les détours. Ça risque de détonner : on a prévenu les riverains pour qu’ils ne soient pas surpris par l’unique explosion qui viendra déchirer le ciel l’espace d’une seconde et pourrait alors alarmer tout le monde, même les plus lunaires et les moins craintifs.

La tête pleine d’étincelles et les pieds refroidis par les premiers frimas d’automne, je file à pied vers les Chanzel.
Je traverse les Tuileries, je salue d’emblée les Rondinone qu’on a installé autour du bassin.
Je regarde tous ces touristes qui se font photographier aux côtés de ces sortes de patates argentées, rigolotes, grimaçantes, régressives à souhait. Je me demande quel est leur intérêt à eux ? De se dire qu’ils y étaient si jamais un jour Ugo Rondinone atteint une côte voisine de celle de Picasso. C’est quoi pour eux ces œuvres ? Is art an entertainement ? Est-ce que ça n’a pas exactement le même intérêt que de se faire photographier près de la femme à barbe ou de l’homme de l’Atlantide… que sais-je ?

Bon, je cours vers d’autres phénomènes : sur les Champs-Elysées, le street Art gagne ses lettres de noblesse et tient le haut du pavé !!!
Alors que l’habituelle « Nuit Blanche » se prépare, de curieux personnages munis d’une bombe aérosol dessinent des formes sur les emplacements habituellement réservés à la publicité sans que les autorités n’y trouvent à redire.
A côté, une paire de baskets fluo multicolores attend devant un box comme si son propriétaire était entré dans l’affiche pour mieux percer l’esprit enchanteur de l’univers Disney.
Il ne s’agit pas de Mickey, Donald, Dumbo… mais de Régis R et du Collectif 1980, tous invités à une carte blanche orchestrée par Disney sur le thème de Halloween.
Seul mot d’ordre aux artistes, le même que pour Halloween dans le Parc Disney de Marne-la-Vallée: « C’est délicieux d’être méchant ».

Régis R. profite de cette vitrine publicitaire pour remettre en question la société de consommation avec une installation réalisée à travers des rebuts de plastique qu’il a glanés au cours de ces promenades dans la ville. Le street art, ce n’est pas juste laisser sa trace sur un mur… c’est vivre dans la ville, en extérieur, l’adopter, s’y adapter. Y survivre donc.

De l’autre côté, le Collectif 1980 donne « 1980 raisons d’être méchant » sur 3 panneaux publicitaires : ils détournent et diabolisent l’univers Disney.
Derrière tout ça, accompagnant Martina, l’une des fées de la comm Disney, en Monsieur Loyal du Street Art, il y a Emmanuel de Brantes.
Son regard pétille en me rappelant que les Chanzel vivent autant le jour que la nuit et que, par conséquent, les œuvres auront une seconde vie une fois la nuit tombée… sans doute cette seconde vie ne sera pas aussi sage qu’il n’y paraît.

Et en parlant d’être méchants voir féroces, on a tous les crocs, une dévorante faim de loup nous entraîne en bande, dans un de ces restaus qui ne doutent de rien question malbouffe à prix d’or. Tout cela est camouflé sous des grands airs… de quoi attraper le touriste !

On est rejoint là par Tristan Dequatremarre. J’adore son nom. Est-ce son vrai nom ? Un conte à lui tout seul, c’est sûrement pour ça qu’il s’est mis à la musique et a mis de l’énergie pure sur les matins de mon enfance dans les eighties : « Je suis de bonne bonne bonne humeur ce matin, y a des matins comme ça… Paris est plein plein plein plein de parisiens, pas assez de parisiennes et trop de parisiens…»
Des airs qui persistent à travers les années. C’est la magie des tubes.
Et de ce tube, il ne faut surtout pas oublier sa très célèbre supplique :« Je prie à mort le Dieu des fesses… pour qu’il ne me laisse pas sans gonzesse».
La chanson du queutard romantique, du dragueur compulsif, du serial lover ou du simple jouisseur ?
30 ans après, je ne sais pas encore où il en est au niveau des gonzesses mais il a toujours l’air de penser Q : toujours « de bonne bonne bonne humeur » le matin, en cemoment, il se balade avec des badges surmontés de la lettre Q. Des badges à messages cryptés. Des rébus.
Celui-là additionne l’image d’un phoque auquel s’ajoute la lettre Q. quant à celui que je récolte, c’est un visage lui aussi suivi d’un Q: je ne reconnais pas le personnage. On m’apprend que c’est Lech Valesa ! Bah oui, evidemment !
Plus chanteur des 80’s mais artiste, Tristan fait aussi de la peinture. Il me tend un carton d’invite pour son vernissage le samedi 10 octobre Rue de Thorigny… sauf que ce jour-là, je suis à Bordeaux pour Evento ou à Grenoble pour l’expo perso d’Olivier Mosset.

Je repars de là pleine d’énergie… tout ça pour me retrouver chez Ricard pour « L’image cabrée », l’expo de Judic que j’adore… mais on sent l’expo faîte avec très très peu de moyens… comme s’il avait été pris au piège de quelque chose en tant que curator. Mais il y a des artistes qui sortent du lot et qui s’en sortent comme Karina Bisch et son paravent, ou bien Sophie Bueno-Boutellier et ses « tableaux de fils tirés » comme on les appelait dans le passé.
Je suis en train de me demander si je ne suis pas surtout alléchée par des esthétiques années 30-40 en ce moment.

Mais là où je sens davantage la crise, c’est dans l’attitude des gens… la courtoisie, le sens des civilités se perd et dans les quartiers les plus friqués et les plus vulgaires comme le 8e et comme dans une grande partie de la Rue Saint-Honoré, ça se ressent à 2000%.
Chez Ricard, le badaud est toujours un demi-mondain parce qu’il l’a décidé. Il estime que tout lui est dû. Du coup, il prend la liberté de s’immiscer dans une discussion entre une experte en art contemporain en plein exercice de ses fonctions -moi !- et la personne qui est censée s’occuper de la presse et qu’on prend vulgairement pour un guide !
Aïe aïe aïe… et personne ne réagit, à part moi… qui me casse.
Il y a des jours, on n’a pas la force de prendre son bâton de pèlerin.
J’ai sans cesse le sentiment d’être à contre-courant ! Je pars. De toute façon, non, vraiment, je n’ai pas envie de rester. Je ne supporte pas cette nouvelle façon de traiter les gens.
Je ne supporte plus les gens qui se croient tout permis, qui coupent la parole de deux personnes dans une conversation importante pour des conneries.
Je ne supporte pas les incrustes, et encore moins ceux qui leur accorde du pouvoir en ne leur faisant pas même remarquer à quel point ils sont mal élevés.
Aujourd’hui, on vous bouscule pour prendre votre place puis on vous dit pardon pour faire passer la pilule.
Il faudrait que toutes ces pouffes males et femelles arrêtent de sécher leurs cours de maintien chez Nadine de Rothschild pour venir errer dans des expositions auxquels ils ne comprendront jamais rien.
Parce que comprendre l’art, c’est aussi comprendre le monde, une société en marche, avoir du recul… on ne peut pas faire semblant, bordel ! Quoiqu’il y en a quelques-uns qui font encore illusion dans le monde de l’art. Mais combien de temps encore ?

D’ailleurs, ça ne rate pas, les mauvaises vibes m’accompagnent jusqu’à la fin de la Rue Saint-Honoré qui n’en finit pas de puer la bêtise. Arghh… que d’abrutis qui pensent qu’une montre, une bague ou une robe hors-de-prix va les sauver de leur médiocrité. Ça ne fait que les renvoyer à leur vide.

Heureusement, je croise Florence Doléac, quelqu’un de fin, sensible, cultivé. Qui n’a pas besoin d’une grosse bagouze ou des échasses dorées pour se sentir exister. Juste quelqu’un qui invente des formes et des modes de vie qui vont avec pour que le monde vive mieux. Pour simplifier nos rapports aux objets, au mobilier et aux choses qui nous entourent en général.
Une designeuse de talent avec qui je prends un café pendant un quart d’heure. Et toutes les deux, perdues par hasard dans l’une des rues les plus malodorantes de Paris, on n’en revient pas de toute cette affligeante vulgarité et assise en terrasse, on mate les passants de cette basse-cour. Le regard vide, ils n’en finissent pas de se donner l’impression de faire l’opinion !

Et on ajoute à cela la fashion week… et là, d’un coup, oui, le taux d’écervelés qui font les paons dans les rues est en hausse. Ça ne respire pas l’intelligence. Cervelets en option, plumes, sauterelles, crevettes… j’ai des nausées. Et j’adore la mode mais pas l’attitude de toute cette volaille qui donne à la mode des airs de connerie, d’emballage vide, d’emphase. Non, pas en 2009 en tout cas. Peut-être à Versailles au 17è, mais aujourd’hui… bof !

je file chez JCDC faire le plein de popeterie pour me remonter le moral et refaire le monde à mes couleurs. J’hésite pendant des heures… et finalement, je suis prise en flag d’achat compulsif par le maître des lieux. Moi qui pensait qu’il serait tout occupé à l’un de ses spectaculaires défilés où je rêve d’aller.

Passage rapide Rue du Mail pour le lancement d’une nouvelle revue -encore une… comme si celle-ci plus qu’une autre allait tirer son épingle du jeu !
Pfffffff ! ça s’appelle « Sang Bleu » en plus… raison de plus pour les flinguer. Effusion de sang.
J’ai l’impression d’avoir quatre ans et de feuilleter un livre d’images ! Oh… c’est bô, oh oui, c’est boooo !
Pas besoin de textes, plus personne ne lit de toute manière !
« Sang Bleu » : c’est une raison de plus pour faire la révolution à ce genre de presse sous perfusée et contre toute cette société de poseurs et de népotistes.
Du champagne ? Mais je n’y tremperai même pas les lèvres. Aucun intérêt tout ça. Vacuité. Et tous ces morts-vivants autour, qui tournent en rond glauquement, à faire semblant de s’intéresser à cette revue aussi vaine que les autres, qui disparaîtra aussi vite que les autres. Déprime !
Bon allez, allez… il est temps de prendre mes jambes à mon cou.
Je n’ai pas assez dormi, ça me met d’une humeur massacrante. Ça va mal finir. J’ai déjà une liste de noms de gens présents que j’ai envie de massacrer sur le champ sur l’autel de leur bêtise. D’anciens amis.
Mais je pars avant qu’un meurtre n’ait lieu et que du vrai rouge sang ne se mette à couler ! Grrrrrrrr !

Dimanche 04 octobre 09

On ne se quitte plus avec Tristan ! On se fixe même des RDV télépathiques. Moi je viens avec mes bagages et une copine et lui avec ses parents !
C’est juste une drôle de coïncidence, dans ce café-restau de Charonne où j’ai brunché avec Léonor… et lui avec ses parents.
Je lui ressors même son badge pour briser l’amnésie.
Des Chanzel à Charonne, « Paris est plein plein plein de Parisiens »… et je tombe deux fois sur le même en 3 jours et dans un quartier diamétralement opposés.
Le 12è a du bon. Ce n’est pas un multiple de 8, Dieu merci !

lundi 12 octobre 2009

Episode 68

Jeudi 01 octobre 2009

Hier, c’était déjà une journée comme je les adore. Une journée où je ne pose pas le pied à terre. En mouvement. Attendue ici et là, je vole d’un lieu à l’autre. Suspendue à mon téléphone. Inspirée. Légèrement en retard.

Je commence par un passage éclair chez Technikart où j’ai fait mes premières armes et où je revois mes collaborateurs des débuts.

Puis pour continuer sur ce revival Technikartien, je rends visite à Thomas Gizolme, l’ex-DA du mag, à mon époque.
Il vient de sortir un livre chez Steidl avec son amoureuse Aline Diépois, elle aussi photographe : c’est un journal en photos et en textes de leur périple sur la Côte Ouest des Etats-Unis, en Airzona, puis à Tucson.
« Histoire de régler mes comptes avec une culture US qui m’inspire et me fascine », me confie Thomas qui a vécu dans la carte postale à l’âge de 20 ans. C’est un « Dust book », un livre qui a mordu la poussière de la Côte Ouest, s’est frotté à ses cactus, a plongé dans ses perspectives illimitées, y a prélevé son actif bifidus à travers des notes, des impressions diverses glanées au jour le jour. Des photos et des textes qui, sur un mode intimiste, rendent hommage à la nature et aux pionniers de la photographie Américaine dont des pointures comme Egglestone. Le duo Thomas-Aline expose d’ailleurs bientôt une série de clichés à la Galerie Acte 2 à Paris début décembre.
Et à part ça, dans cette maison pleine d’enfants, de chat et de chiens, dans cet appartement qui semble loin du tumulte Parisien et qui est parcouru par une belle énergie, un projet en chassant un autre, ils me parlent aussi de « Doolitle », la revue pour enfants qu’ils lancent en kiosque avant la fin de l’année.
L’American Way of Life, cet appart lumineux plein d’enfants et de confitures, d’aventures US, d’édition, de photographie et de presse fait tout doucement rêver… et assise sur ma chaise, je tape mon adresse mail sur le clavier de Thomas. C’est le moment de checker mes mails.
Mais arrivée sur la page d’accueil, je réalise que la dernière personne à s’être installée sur cette chaise, c’est… Melvil, l’un des meilleurs amis de Thomas. Celui dont je rêvais par épisodes, à une époque. Et de rêve en rêve, notre relation plus ou moins amicale s’améliorait.
Mais dans le réel, c’est un leitmotiv… on s’est encore ratés ! Je me dis qu’à part au vernissage de Philippe Parreno au Couvent des Cordeliers, sous le néon de la salle du dîner, on se rate tout le temps d’une semelle ou presque. Ça ne peut plus durer !

Et pour en revenir aux USA, le lendemain-même, je me retrouve dans une nouvelle ambiance Américaine… moins proche de la nature au sens végétal. Mais plus proche de la nature au sens humain.
C’est une Amérique plus eighties et plus éclairée par les lumières artificielles des scènes de concert et des clubs.
Ça sent le gros son à tendance romantique avec David West : un Américain plongé dans un paysage à l’anglaise, celui du jardin de l’Hôtel Particulier.
La petite chanson très « Swinging London » à la française de Gainsbourg me passe par la tête pendant que je m’installe sur la terrasse automnale des lieux.

Arrive David West. Je le reconnais à un détail : sa bague.
Et dans le réel, elle est surmontée d’une turquoise, assortie au jean’s et aux yeux de ce monsieur qui doit avoir aux alentours de 55 ans.
Je la voyais cette bague se balader sur l’écran, en ombre Chinoise, il y a moins d’une semaine. Elle dansait sur le grand écran du Centre Pompidou, pendant le concert d’Adam Green et de Carl Barat. Elle était à la main gauche, de ce dessinateur-performer-live, il la portait à l’auriculaire de sa main la plus adroite des deux : celle qui dessine et qui se remarque. Celle qui retranscrivait l’excitation scénique et les contours mentalo-psychiques des musiciens sur scène.

C’est un romantique festif aux cheveux métalliques qui a gardé en lui l’esprit pop des 80’s. passionné de musique, amoureux de la scène, ami des musiciens, sans doute lui-même musicien dans une autre vie, cet Américain à Paris est aussi un alchimiste du cocktail. Il joue avec les textures, les couleurs, les gôuts, il monte même tout bonnement des architectures gustatives, des sculptures liquides… et c’est dans ce lieu hors-temps qu’est l’Hôtel Particulier, en plein été indien, qu’il crée ou résuscite des cocktails oubliés comme d’autres vous ressortiraient de vieilles photos au coin du feu. Leurs doux noms vintage et leur merveilleuses robes tombées en désuétude sont enfermées dans la transparence des verres. Tous ces gôuts sont comme la « Madeleine de Proust » censés rappeler des lieux, des atmosphères, des ambiances, des années millésimées.
Le « Baldhead » à base d’absinthe, de gin et de vermouth a le goût classique de l’interdit dans lequel on est prêt à se noyer début XIXè. Le «Train Bleu » a une note bleue citronnée qui rappelle les années où l’on se laissait aller à un Fox-Trot. Moulin Rouge nous rappelle à la chaleur suintante d’un Toulouse-Lautrec.
« Panama » nous ramène à la chaleur estivale des Iles d’Outre-Mer, « Brooklyn » à la Prohibition, à Al Capone et sa bande et la glaçante « Kretchma » nous plonge en pleine Guerre Froide… bref, pas de quoi s’ennuyer, comme toujours !

Mais tous ses cocktails, il faura que j’attende 2010 pour les siroter un soir en terrasse de l’Hôtel Particulier. Car déjà le soleil se couche de plus en plus tôt, on commence à sentir le froid s’immiscer entre les mailles de nos fringues, et dans nos ballerines, le pied nu commence à ne plus être aussi sûr de lui… de l’été Indien, c’est je crois la fin.