Samedi 19 septembre 2009
De tous les Eudeline, Patrick, mon préféré est dans la place… dans les escaliers, il se protège de la foule dans le sfumato (lui aussi) de ses lunettes noires.
Il a sa place pour le concert, tout comme les fans qui font un sit-in depuis 11h du mat à l’entrée des artistes. Le hall du Centre Pompidou a quelque chose de pop tonite, et même un brin Brit’. A moins qu’on ne soit dans le vestiaire de Top Shop ? Brit’Shop Pop?
C’est pas tous les jours qu’un ex des Libertines est en concert à Beaubourg.
Naaaaaaaan… Pas Pete Doherty, l’ex de Kate Moss ! Non. L’autre pilier du groupe : Carl Barât himself.
Les responsables de tout ce raffut et de ces concours d’élégance à Beaubourg sont donc Carl Barât… et Adam Green from New York.
Le New Yorkais Vs le Brit’ from London.
Ça pourrait être un épisode d’Amicalement Vôtre : des décennies plus tard, Lord Brett Sinclair et Dany Wilde se rencardent sur la scène de Beaubourg, au niveau -1… Evidemment, ils avaient été cryogénisés et au réveil, ils avaient en plus changé de tête et embellis. Et depuis, forcément, parce que ce sont de jeunes gens modernes, ils se sont mis au son.
Et ce soir, duel de guitares, de chants et de micros seront au centre des festivités. Une vraie battle. On rivalise de talent.
It’s better than ever, et j’en perds mon latin, mon frenglish me revient. Damned. Adam Green met le starter. Un New Yorkais !
Adam. Green. D’abord il y eut donc, comme tout le monde le sait, Adam… puis vint le Green dans lequel on le plongea. On dirait une comptine. Il était une fois Adam, perdu dans la nature. Dans la verdure. Dans le Green.
D’aillleurs, en turc, « adam » est un nom commun. It means « man ». Carrément Edenique, d’autant que le jardin d’Eden, c’est juste une faute de frappe orginelle : because « eden » = « adam » et vice versa. C’est de l’étymologie Anaïdienne.
Adam. Comment peut-on porter un prénom si… premier, en fait. Et green, le nom d’une couleur si naturelle, si… régénérante.
Bon, piqûre de rappel : mon cœur est à Guy McKnight des « 80’s Matchbox B-line Disaster », sorry. Mais même mon scottish McKnight parle aussi d’Adam et d’Eden dans les lyrics de « In the garden":
« And in the garden, yeah, I was the first / The first to win a place on this bad earth / I lay around under the apple trees / My name is Adam in the garden of Eden
And then a serpent turned and said to me / "Why don't you pick an apple from the tree?" /
I said to it "I don't know if I should" /"Oh what the hell," it said, "it tastes so good"»
Je suis intriguée par ce personnage en shoes rouges et en jean’s pattes d’eph qui s’appelle « Vert ». Une vraie tornade verte et rouge. Un peu éméché.
On s’ennuyait ferme quelques secondes encore avant son arrivée.
On s’endormait en compagnie d’une grande fille toute simple comme on dit. Une de ces filles comme en fait que dans le fin fond de certaines contrées dont je ne me rappelle plus le nom… peut-être chez les Hamish.
Elle s’appelle Gibson, comme les guitares m’a-t-on soufflé en fin de soirée. Du reste, c’est aussi bien qu’Elvire-Bonduelle-comme-les-petits-pois ou Albert-Findus-comme-les-surgelés.
Une voix cristaline, aussi evanescente qu’une effluve d’ether. Une voix presque aussi pure que du cristal de roche mais pas non plus de quoi ébrécher une coupe de champagne… plutôt du genre à respirer vraiment l’ennui, même. A tous les coups, c’est mieux en disque. A écouter chez soi, les soirs de spleen. Et il y en a.
Et si elle était là pour chauffer la salle, c’est loupé. Elle est soporofique.
Et son style de jeune femme rousse à tresses, en chasuble déformée et en sabots de fille sympa, timide et vulnérable m’a stressée. Et même épouvantée. Elle nous a rincés, tués avec son sirop de lullaby sur-sucré. Overdose.
Et d’un coup Adam Green est venu cracher le feu en shoes rouges, jean’s et marcel blanc. Un choc des cultures. Une hallu.
Physiquement… comment dire, c’était la gueule d’Al Pacino avec la voix de Jim Morrison. Puis le charisme et le jeu scénique de Mick Jagger !
Age mental de ses déconnades : 14 ans ¾. Hallucinant. Et il nous raconte une histoire sur sa bouteille de bière vieille de 4 siècles au moins : une « 1664 » !
C’est le chef de file de l’Anti-Folk. Ça tombe bien, j’aime pas la folk.
Est-ce que ça veut dire que la fille qui l’a précédé sur scène était son antithèse ? C’est comme ça que je le vis de toute façon.
Des pas de danse intempestifs. De l’humour. Du bagou.
Un enfant terrible du rock. Une tête-à-claques comme on les aime mais qui, on stage, une fois le micro armé peut vite lasser si le talent ne suit pas. Mais évidemment, ça suit… et c’est même pire que ça, cet énergumène qui fait le bouffon autour de son micro est un véritable génie !
Et même si ces musiciens se cassent, qu’il s’assoit sur une chaise et prend sa guitare sèche pour pousser la chansonnette… même s’il demande un médecin toutes les 2 minutes parce qu’il aurait pris froid ou trop fait la fête la veille en compagnie de « 1664 » friends… ça passe et plus que ça même, ça ondule, ça vibre en nous.
Même quand le clown décide de faire sa soirée autour d’un rouleau de Chatterton qu’il a dû trouver en backstage et qu’il fait même monter deux victimes sur scène… juste pour le plaisir de les enrubanner !
C’est pas toujours très subtil sur le plan comique, c’est de la potacherie de base… mais ça fonctionne parce qu’Adam Green a ce truc indéfinissable… Comment ça s’appelle ? C’est quoi ? Un truc ! C’est le « mojo » quoi. C’est indéfinissable. C’est sorcier ! C’est diabolique. C’est enchanteur.
Et quand le Dandy Brit’ Carl Barat déboule sur scène, plus élégant, le regard ténébreusement bleu sous son Borsalino noir, et la démarche plus assuré, on atteint notre pic de bonnes vibes sonores dans la salle.
Et on les sent très complices, Adam et Carl. Carl et Adam. Miam, on en ferait son quatre heures. Lequel des deux ? Les deux. Et manifestement, ce n’est pas leur première rencontre scénique.
C’est la battle des battles. La rencontre entre deux bombes sonores énergétiques. Deux bourreaux des cœurs… dont un totalement amoureux de sa violoncelliste, comme j’en aurais le sentiment tangible durant sa prestation solo quelques minutes plus tard… et qui plane forcément à 3000.
D’un coup, je réalise… je jette un coup d’œil sur le public : je jurerais que le taux de testostérones est en baisse dans les sous-sols du Centre Pompidou… Je checke. Ouais, exact ! Que de jeunes filles et de jeunes femmes totalement surexcitées ! Faîtes de la musique les mecs, c’est complètement aphrodisiaque. Mais ayez du génie tout de même.
Que de la femelle en effervescence ou presque pour cette rencontre d’exception que les deux saltimbanques concluent par de tendres baisers à la russe. C’est digne de deux punks bien éméchés. Ils veulent nous achever?
Carl Barat, tout seul ? Je suis moins emportée. Trop d’ennuis avec sa guitare. Les plugs fonctionnent mal. Mais ça reste du haut niveau. Et il est joliment encadré par une violoniste et une violoncelliste qui ont emprunté leurs nippes de dentelle noire et leur lipstick ultra-sanguin dans la penderie de Morticia Addams.
Je me surprends même à décrypter les relations qui se tissent entre ces trois personnages. La violoniste au milieu se sent comme une intruse. Comme si on l’avait parachutée au milieu de deux personnages qui n’ont d’yeux que l’un pour l’autre. Ça sent la fraîche idylle. On lit dans leurs regards mi-génés, mi-amusés que ce sont les premiers instants. Ceux qui ondulent. Ceux qui frisent.
Et c’est le cas… comme toutes les petites minettes qui comptaient attirer Barat dans leurs filets le soir-même pourront le constater le soir-même au ChaCha.
Et derrière, sur l’écran, un screen-saver de nos émotions. On voit une main dessiner l’atmosphère. Une main gauche à bagouze. En live. Elle reprend les lignes de force de l’atmosphère. Passe les courbes des émotions à l’aquarelle, fait rosir les sons, caresse de son pinceau les secousses sismiques de cette aventure scénique. C’est David West aux manettes. Dans les coulisses et retranscrit sur grand écran en simultané, cette main mystérieuse et savante croque la scène en live. Dans son coin, à l’abri des regards, sur papier. Une à une, les couleurs et les émotions de cette séquence scénique hors-pair se diluent dans l’eau de son aquarelle, et il les reporte sur sa feuille de papier ultra-sensible. C’est de la peinture live. Ou bien de la performance.
Art de la scène et scène de l’art se mèlent, et « Stage of the art » signe la rencontre.
Et dans la vraie vie, un vrai concert, c’est cette intensité-là, ce truc palpable dans l’air !
Quand je pense que j’ai croisé quelqu’un il y a quelques jours à La Ciotat qui revenait du concert de Mylène Farmer au Stade de France !
Bon, euh, Mylène Farmer, déjà… sans commentaires. J’ai mieux à faire !
Mais en plus, je n’ai jamais compris l’intérêt d’aller en concert quand on ne peut même plus avoir la tentation d’envoyer une tomate ou des fleurs -voire des baisers- au bandit qui se produit sur scène ! Mais pour tout ça, il faut respecter une distance raisonnable. Au cas où ! Sinon, autant pirater les morceaux ou pire, si vraiment on ne peut pas s’en passer, acheter le CD. Quand on ne peut plus savourer le plaisir de se faire entendre du saltimbanque, de se sentir proche de lui, dans sa bulle, dans son souffle, dans son atmosphère… autant suivre ses délires en différé et ne surtout pas prendre la peine de dire, à la sortie, « j’y étais »!
Et d’ailleurs ici, pour les émotions, c’est OK… pour la participation du public : c’est idem.
Quand Adam Green réclame quelqu’un sur scène, personne ne veut y aller. Et pourquoi jouer à la marelle avec un anaconda aussi ou sauver un scorpion des eaux avec les doigts?
Armé de son simple rouleau de Chatterton, Green a déjà ligoté sur scène deux pauvres victimes qui se trouvaient dans le public et lui faisaient une confiance avegle.
Et comme si ça n’y suffisait pas, il finit par un véritable acte de barbarie que seuls quelques autres bandits du rock ont exécuté dans l’histoire jusque-là, mais toujours avec cette violence indicible…
Au moment des rappels, Adam Green, en fin de concert, toujours avec le sourire et animé par ses pulsions enfantines, se charge, avec une cruauté elle aussi toute enfantine de mettre à mort sa guitare sèche.
Exécutée sur un pied de micro. Solidement fixée au Chatterton puis fatalement empalée.. Et dans un lourd silence assassin, on assiste scotchés aux cris de cette pauvre bête, sacrifiée sur l’autel du rock, sans qu’on ne puisse réagir.
Ça me rappelle une vidéo magnifique de Christian Marclay qui elle aussi montrait une mise-à-mort d’une intensité similaire.
C’était les gémissements sauvages d’une guitarre électrique trâinée par un camion sur des kilomètres et des kilomètres à travers le désert texan. Un spectacle qui déjà pouvait heurter les âmes sensibles! Mais c’était une vidéo, bordel ! C’était pas du live !
Juste de quoi rappeler qu’une guitare, ce n’est pas juste un instrument… mais des cordes, une tête, un manche, un corps… qu’on y pense ou non, ça fait réfléchir à la possiblité d’une âme derrière tout ça ! Green qui porte le prénom du premier homme nous l’a juste rappelé en fin de soirée, histoire de nous réveiller avec son sa savante innocence habituelle !
dimanche 4 octobre 2009
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